Is 35, 1-6a.10 ; Ps 145 (146) ; Jc 5, 7-10 ; Mt 11, 2-11
Frères et sœurs,
Cette année, la fête de saint Corentin se situe dans une conjonction de dates anniversaires autour de la personne de Jésus. Les 2 025 ans de sa naissance, les 1 700 ans du Concile de Nicée, et les 350 ans de l’apparition de Jésus à sainte Marguerite-Marie. Ces anniversaires remettent sur le devant de la scène la question de sa personne : « Qui est vraiment Jésus ? »
Le fait même que nous comptons désormais sur toute la planète les années civiles à partir de sa naissance, il y a 2 025 ans, montre à quel point l’humanité est marquée dans son histoire par sa personne qui a bouleversé et continue de bouleverser la vie de beaucoup de gens. Le Concile de Nicée en 325 a porté également sur cette question : « Qui est vraiment Jésus ? » et les évêques de l’époque ont pu mettre des mots sur leur foi en affirmant que Jésus était vraiment homme et vraiment Dieu. Nous le proclamerons dans le Credo de Nicée dans quelques instants.
C’est aussi cette année que nous célébrons les 350 ans de l’apparition de Jésus à sainte Marguerite-Marie, avec cette parole de Jésus montrant son cœur : « Voici ce Cœur qui a tant aimé les hommes ! » Cette apparition a fait ressortir d’une façon renouvelée l’amour de Jésus pour chacun de nous. Avec ce signe du Cœur blessé de Jésus, son amour offert en sacrifice, qui est une source de vie pour l’humanité.
En fait, la personne de Jésus a été de tout temps une interrogation et elle le reste. Qui est vraiment Jésus pour nous ? Dans l’Évangile de ce jour, Jean-Baptiste pose la question : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? » Cette question peut paraître étonnante puisque Jean-Baptiste était son cousin et qu’il l’avait désigné clairement au bord du Jourdain comme le Messie. Mais Jean-Baptiste devait être comme les apôtres et tous leurs contemporains qui attendaient que le Messie de Dieu se manifeste dans la puissance et la gloire.
Or Jésus répond aux envoyés de Jean-Baptiste, non pas par des affirmations qui ne seraient pas forcément crédibles, mais par les actes qu’il réalise, notamment les guérisons et le fait que les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. Des faits que le prophète Isaïe présentait comme les signes annonciateurs de la venue du Messie. Jésus montre clairement ainsi que ce n’est pas par la puissance des armes qu’il sauve l’humanité, mais par l’amour le plus absolu et le don total de sa vie. Un amour qui se propage par la puissance de Dieu dans le cœur des disciples.
Ce don total le conduira jusqu’à la mort sur la Croix. Ses disciples et ses apôtres ne comprendront ce dessein de Salut qu’après sa Résurrection d’entre les morts et en recevant à la Pentecôte le don de son Esprit. C’est là qu’ils vont vraiment comprendre qui était Jésus et se remémorer ses paroles de vie.
Dans la période trouble dans laquelle nous vivons, avec les guerres qui n’en finissent pas et qui ne rassurent pas sur l’avenir de l’humanité, les défis climatiques dont nous ne voyons pas comment en sortir, ou même, en France, les difficultés à gouverner, nous avons des raisons d’être inquiets. Mais l’inquiétude ne mène à rien. Il est bon de nous rappeler que le Salut de l’humanité passe par la conversion des cœurs en nous laissant toucher par le cœur aimant de Jésus.
C’est le message que Jésus nous a donné par sa prédication et par sa vie et dont il a confié à ses apôtres la mission d’en témoigner. Il nous a permis d’être ainsi habités par l’espérance que le mal et la mort n’auront pas le dernier mot sur cette terre. Cette espérance a été au cœur de cette année jubilaire puisque le pape François avait voulu justement raviver notre espérance pour que nous devenions des pèlerins d’espérance là où nous vivons. « L’espérance, en effet, disait-il, naît de l’amour et se fonde sur l’amour qui jaillit du Cœur de Jésus transpercé sur la croix.[1] »
Le temps de l’Avent dans lequel nous sommes entrés depuis deux semaines a pour objectif justement de raviver en nous notre foi en Jésus et notre espérance. À nous reposer aussi chacun la question : « Qui est vraiment Jésus pour moi ? Qu’est-ce qu’il change dans ma vie ? »
Nous voyons partout en vente des calendriers de l’Avent qui sont en fait des opérations commerciales pour nous faire acheter du chocolat, des saucissons, des cosmétiques et je ne sais quoi encore. Ils sont là pour anticiper une fête de Noël qui n’a plus grand-chose à voir avec l’Avent justement, puisque ce terme qui vient du mot « avènement » désigne l’Avènement du Christ.
Cet Avènement, nous l’attendons pendant ce temps de l’Avent avec des lunettes progressives. En regardant de près nous voyons le premier avènement de Jésus, lorsque Dieu s’est fait homme en sa personne il y a donc 2 025 ans. C’est un fait historique majeur que nous célébrons à Noël. C’est le mystère de l’Incarnation : Dieu s’est fait homme pour que l’homme entre dans la vie de Dieu comme nous le rappelle saint Irénée.
Et nous changeons de focale pour regarder au loin l’Avènement de Jésus à la fin des temps comme il l’a annoncé à maintes reprises dans sa prédication et que nous proclamons aussi dans le Credo : « Il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts et son Règne n’aura pas de fin ». Cet Avènement nourrit notre espérance et nous appelle à veiller pour agir selon la volonté de Dieu et orienter notre vie pour le bien.
En fait, il y a un troisième Avènement de Jésus comme saint Bernard le fait remarquer. Quel est-il ?
C’est ce que nous sommes en train de célébrer ici même. Sa venue dans notre vie de chaque jour par le don de sa Parole, celui des sacrements et les dons du Saint Esprit. « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps », dit Jésus.
Conclusion, la question de savoir qui est vraiment Jésus trouve sa réponse dans la manière avec laquelle il s’est révélé à nous dans l’histoire et avec laquelle il continue de se révéler aujourd’hui pour nous sauver et sauver notre humanité.
Alors que peut-on retenir pour nous en ce temps de l’Avent ? Je vous propose trois pistes :
Frères et sœurs, que ce pardon de saint Corentin qui a été un des fondateurs de l’Église en Finistère soit l’occasion cette année pour chacun de nous de renouveler notre foi en Jésus, vrai Dieu et vrai homme. Il est le Sauveur de notre humanité et la source de notre espérance. Le temps de l’Avent est une belle occasion pour nous y aider. Amen.
+ Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon
[1] Pape François : Spes non confundit n° 3