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Un cantique breton pour le Jeudi Saint : Deomp holl da liorz Olived

Un cantique breton pour la procession au reposoir du Jeudi Saint :

Deomp holl da liorz Olived

Bien oublié aujourd’hui, ce beau cantique de la Passion figurait encore dans le Kantikou brezoneg de 1946, au n. 121, p. 162-164. Les paroles sont de l’abbé Yann-Vari Leon (1840-1923), natif de saint Jean du doigt, recteur de Cléder ; une variante du cantique est également connue sous le titre « E-barz jardin Olived ».

Chanté pendant la procession au reposoir, par laquelle se poursuit la messe de la Cène du Seigneur (In Cœna Domini), ce cantique traditionnel permet d’entrer doucement dans le mystère de la Passion. Ses paroles permettent en effet de s’unir dans la prière avec le Christ, de se tenir auprès de Jésus dans sa Passion, de porter avec lui la souffrance du monde qui l’accable, et de méditer le grand mystère de l’amour de Dieu pour l’humanité.

« Deomp holl da liorz Olived, Kerzomp war roudou Jezuz ; Heuilhomp Mab Doue a spered En e angoni skrijus. »
(Allons tous au jardin des Oliviers, Marchons sur les pas de Jésus ; Suivons le Fils de Dieu par l’esprit Dans sa terrible agonie.)

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On notera que le couplet 9 exprime l’idée que durant sa vie, le Seigneur avait déjà enduré bien des peines, l’une après l’autre, comme en chaîne, mais qu’ici, en sa Passion, elles se déchaînent toutes à la fois (war-eun-dro) avec une sorte d’association d’idées : s’enchaîner (an eil goude e-bén) / se déchaîner (dirolla).
Le dernier couplet invite les chrétiens à éprouver de la contrition au pied de la Croix : « Pense à son agonie sans pareille, à sa croix, à sa souffrance ; et, le cœur plein de douleur, pleure à chaudes larmes, fais pénitence ».
Voici les paroles, avec leur traduction :

1. Deomp holl da liorz Olived,
Kerzomp war roudou Jezuz ;
Heuilhomp Mab Doue a spered
En e angoni skrijus.
E galon beuzet er glac’har,
En daelou e zaoulagad,
Daoubleget betek an douar,
En em erbed ouz e Dad.
2. Burzud dispar a garantez,
Jezuz, Roue an neñvou,
Jezuz, Mestr leun a zantelez,
A gemer hor pec’hejou :
Pebez szamm ’zo kouezet warnañ !
Ar pec’hejou tremenet,
Ar pec’hejou a raer bremañ,
Kement pec’hed a vo grêt.
3. Azalek ar pec’hed kenta
A reas Adam gwechall,
Betek ar pec’hed diweza
’Ray an diweza den fall,
War e gein o gwelan berniet,
Ken uhel ha meneziou ;
Penaos neuze beza souezet
Ma skuilh kement a zaelou ?
4. War e gorf sakr me ’wel ledet
A bep seurt loustoni / ou ;
En-dro dezañ, me ’wel skoulmet
Eur c’houriz a bec’hejou.
Setu e pe stad ’mañ Jezuz,
An Doue teir gwech santel ;
Setu al labour ifernus
Grêt gant ar pec’hed marvel.
[…]
9. Bez’ en do en e Basion
Da ziwaska poan, añken,
Komzou goapa / us, rann-galon,
Met an eil boan goud’ eben…
Amañ ’tirollont war-eun-dro,
Evel bleizi kounnaret ;
En eun dristidigez c’houero
E galon a zo beuzet.
[…]
12. Pec’her, dastum ar beradou,
Beradou gwad presius,
A red evit da bec’hejou
Diouz korf da Zalver Jezuz.
Soñj en e añgoni dispar,
En e groaz, en e añken ;
Ha da galon leun a glac’har,
Gouel dourek, gra pinijenn !
1. Allons tous au jardin des Oliviers,
Marchons sur les pas de Jésus ;
Suivons le Fils de Dieu par l’esprit
Dans sa terrible agonie.
Son cœur (est) noyé dans le chagrin,
Dans les larmes (sont noyés) ses yeux,
Courbé en deux jusqu’à la terre,
Il se confie à son Père.
2. Miracle sans pareil d’amour !
Jésus, Roi des cieux,
Jésus, Maître de sainteté,
Prend nos péchés :
Quelle charge est tombée sur lui !
Les péchés passés,
Les péchés commis maintenant,
Tout péché qui sera commis.
3. Depuis le premier péché
Que fit jadis Adam,
Jusqu’au dernier péché
Que fera le dernier mauvais homme,
Je les vois entassés sur son dos
Aussi haut que des montagnes ;
Comment alors être surpris
Qu’il verse tant de larmes ?
4. Je vois son corps sacré outragé
Par toutes sortes de d’abominations ;
Autour de lui, je vois nouée
Une ceinture des péchés.
Voici en quel état se trouve Jésus,
Le Dieu trois fois saint ;
Voici le labeur infernal
Accompli par le péché mortel.

9. Il aura dans sa Passion
À endurer peine (et) angoisse,
Des paroles moqueuses, un profond chagrin,
Les souffrances s’enchaîneront
Et se déchaîneront toutes à la fois
Comme des loups enragés ;
Dans une tristesse amère
Son cœur est noyé.
12. Pécheur, ramasse les gouttes,
Les gouttes de sang précieux,
Qui tombent pour tes péchés,
Du corps de Jésus le Sauveur.
Pense à son agonie sans pareille,
À sa croix, à sa souffrance ;
Et, le cœur plein de douleur,
Pleure à chaudes larmes, fais pénitence.

Ce cantique peut être chanté sur deux mélodies différentes, la plus connue étant celle d’une musique attribuée à Pergolèse († 1736) : voir Kantikou Brezonek Eskopti Kemper ha Leon, 1946, n°121, p. 162-164, et n°121 bis, p. 164.

En cliquant sur le lien suivant, on peut écouter le début de ce cantique chanté par Yann-Fañch Kemener dans son album Ar Baradoz. Chants sacrés de Basse Bretagne (2017).
Ou encore, cette version instrumentale (bombarde et orgue) sur Youtube.

Partitions pour bombardes sur le site kan-iliz : http://www.kan-iliz.com/e-barz-ar-jardin-olived/