Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  10 mai 2025 – 4e TP — Année C — Bénédiction après travaux de restauration de l’église Saint-Tugdual — (Saint-Pabu) (29)

10 mai 2025 – 4e TP — Année C — Bénédiction après travaux de restauration de l’église Saint-Tugdual — (Saint-Pabu) (29)

Ac 13, 14.43-52 ; Os 99 (100) ; Ap 7, 9.14b-17 ; Jn 10, 27-30

Frères et sœurs, chers amis,

L’église n’est pas un monument comme les autres. Il y a des sentiments qui ne s’expriment pas avec des mots. On pourrait parler d’une atmosphère particulière. J’ai rencontré à plusieurs reprises des adultes qui demandaient le baptême, car ils avaient vécu une expérience spirituelle en entrant dans une église. Ressentant notamment une grande paix intérieure ou une consolation dans des moments d’épreuve. C’est cela qui les a décidés à connaître la foi chrétienne puis à demander le baptême.

De fait, l’architecture de l’église est hautement symbolique, car elle représente l’Église avec un É majuscule, c’est-à-dire la communauté des croyants, le Corps du Christ disait saint Paul (cf. 1 Co 12, 27). Les pierres bien agencées et les décorations symbolisant le peuple des croyants, chacune à sa place, contribuant à la cohésion et à la beauté de l’ensemble. Les petites pierres étant aussi nécessaires que les grandes. Ce qui veut dire que même les plus pauvres ont leur place et apportent quelque chose aux autres.

Cette église est construite en forme de Croix. Cela nous rappelle que c’est Jésus ressuscité qui est le pasteur de son peuple, qui le rassemble et qui le conduit comme nous venons de l’entendre dans l’Évangile de ce jour : « Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle ». Et l’autel, bien au centre, représente le Christ Jésus, le Bon Pasteur qui nourrit son peuple par sa Parole de vie et par son propre corps lors de la célébration de la messe.

Cela manifeste concrètement ce que nous avons entendu dans le livre de l’Apocalypse en 2e lecture : « L’Agneau qui se tient au milieu du Trône sera leur pasteur pour les conduire aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. » On pense à toutes les personnes dans la souffrance ou en deuil qui ont trouvé ici la consolation et même retrouvé la joie de l’espérance.

La décoration intérieure, les vitraux, la statuaire, la décoration florale et même l’affichage des informations paroissiales à l’entrée de l’église, sont les signes de la foi vivante des chrétiens qui se succèdent ici depuis des siècles pour prier et célébrer la messe, mais aussi les baptêmes, les mariages et les funérailles ou encore pour se réconcilier et recevoir le pardon de Dieu. Autant de moments forts de la vie des croyants qui s’unissent à Dieu, lui qui est la source de notre vie ici-bas et par-delà notre mort. « Jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main »,dit encore Jésus dans l’Évangile de ce jour.

Cette architecture, elle est vivante comme le peuple qui l’habite. Elle souffre donc aussi des blessures du temps et de l’histoire. Cette église a été sans cesse réparée, enjolivée, et en grande partie restaurée comme cela a été le cas ici. Et dans ce sens, elle représente aussi notre humanité et même notre création qui gémit dans les douleurs d’un enfantement qui dure encore, comme dit saint Paul (cf. Rm 8, 22).

L’architecture de l’église a de l’importance pour tout le monde, même pour les non-croyants, pour sa valeur patrimoniale. Mais cette valeur, comprenons-le, ne réside pas seulement dans le magnifique travail des artisans qui l’ont réalisée. La valeur symbolique est bien plus forte et elle touche le cœur de tout le monde, même de ceux qui la visitent sans être croyants.

C’est l’histoire du Salut qui se révèle à travers tout cela, c’est-à-dire l’œuvre d’amour que Dieu réalise en la personne de Jésus pour sauver l’humanité. Lui qui, après avoir manifesté l’amour de Dieu par ses gestes et ses paroles, a offert sa vie sur la croix par amour pour nous. Cette croix dont le signe lui-même parle à ceux qui souffrent physiquement ou qui sont dans l’épreuve. Mais cette croix est glorieuse, car nous croyons que Jésus est ressuscité des morts, et elle rappelle que si nous mettons notre foi en lui, Jésus continue de donner sa vie pour chacun de nous par sa Parole, par les sacrements et le don de l’Esprit Saint.

La Parole de Dieu dans le livre des Actes des Apôtres évoque les difficultés que Paul et Barnabé ont rencontrées pour annoncer la Bonne Nouvelle de la Résurrection du Christ. Ces conflits et divisions, qui existaient déjà au début de la prédication évangélique, résonnent d’une manière particulière à l’occasion de cette restauration, car elle met en lumière certains aspects de ces blessures du temps que j’ai évoquées en parlant de l’architecture de l’église qui a dû être réparée à plusieurs reprises. Autrement dit des défis que l’Église doit surmonter dans l’histoire.

Cela se constate actuellement dans les communautés chrétiennes à travers les sensibilités pastorales ou liturgiques parfois divergentes. Cela se ressent dans la préparation des baptêmes, mariages ou des funérailles. « Je veux une cérémonie qui me corresponde », entend-on souvent. On ne se posait pas ce genre de question autrefois !

Lorsque le prêtre célèbre la messe, il a devant lui des fidèles qui sont de situations sociales diverses et qui ont des positions politiques opposées. Et pourtant ils sont là pour accueillir le don de Dieu et se reconnaître comme frères et sœurs dans le Christ. C’est Lui qui les rassemble dans une communion qui les dépasse. Le baiser de paix avant la communion est fort. Il est le signe que nous devons toujours rechercher ce respect mutuel au-delà de ce qui nous divise.

Dans ces blessures du temps, il y a aussi les divisions qui semblent se développer dans la société, notamment en raison d’une priorité de plus en plus grande donnée par les personnes à leur intérêt personnel aux dépens du bien commun. Les maires évoquent souvent cela dans les rencontres que j’ai avec eux.

Nous sommes donc sans cesse appelés à nous convertir pour accueillir le don de l’unité, qui est un don de Dieu, par notre prière, notre écoute attentive de la Parole de Dieu, en accueillant la grâce des sacrements et en manifestant l’amour du prochain.

Lors de cette messe célébrant la restauration de cette église, nous tenons à exprimer notre gratitude envers tous les contributeurs, tant publics que privés, qui ont apporté leur soutien financier. Nous remercions également les bénévoles dévoués qui veillent à l’entretien de cette église.

Et puisque je l’ai dit, cette église représente symboliquement la communauté chrétienne, nous pouvons aussi y recevoir un appel à construire ensemble, et avec ceux qui ne sont pas membres de l’Église, une société qui ressemble à cet édifice restauré, c’est-à-dire un lieu de paix, de concorde, de respect mutuel, de bienveillance. Lors de sa première intervention, le pape Léon, en s’appuyant sur la parole du Christ a invité l’humanité à la paix. Nous pouvons recevoir ce message pour nous. Puisse le Seigneur nous assister et nous en donner la force qui vient d’en haut. Amen.

† Laurent DOGNIN 
Évêque de Quimper et Léon