Ac 8, 14-17 ; Jn 14, 23-31
Chers confirmands,
D’abord, je vous remercie pour les lettres que vous m’avez adressées et pour vos témoignages. Vous me demandez à recevoir le sacrement de confirmation et c’est avec joie que je viens vers vous en tant que successeur des apôtres, et comme les apôtres Pierre et Jean l’avaient fait au commencement de l’Église auprès des samaritains, je vais prier Dieu de vous combler de l’Esprit Saint.
Et si les apôtres ont prié ainsi, c’est bien parce que le fait qu’ils soient baptisés, même au nom du Seigneur Jésus, n’était pas suffisant. Ils devaient recevoir le don de l’Esprit Saint en plénitude pour engager pleinement leur vie comme disciples et devenir témoins du Christ. Ils devaient recevoir l’Esprit Saint pour avoir la lumière de la foi et la force de tenir bon face aux assauts du « prince de ce monde » comme le nomme Jésus dans l’Évangile.
Aujourd’hui, l’Esprit Saint va vous être donné en plénitude et il opérera en vous une transformation. Mais quelle transformation ? Qu’est-ce qui va changer véritablement ?
Tout d’abord, je dois préciser ce que l’Esprit Saint ne fait pas, car il ne s’agit pas d’un geste magique. La confirmation n’efface pas nos fragilités, ni ne supprime nos difficultés personnelles, ou encore ne résout pas nos problèmes de santé…. L’Esprit Saint ne nous ôte pas notre liberté ni notre humanité, avec ses faiblesses.
Que fait-il alors en nous ?
Nous avons entendu de la bouche de Jésus dans l’Évangile : « Quand viendra le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui vous enseignera tout et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit ». L’action de l’Esprit Saint se traduit donc d’abord par cette connaissance : connaissance de la volonté de Dieu et de l’amour que le Seigneur nous porte à un point tel que nous ne pouvons même pas l’imaginer.
Cette connaissance est la relation intime que nous développons avec le Seigneur par le don de l’Esprit Saint. Un amour un peu étonnant, car un amour sans visibilité, en effet nous ne voyons ni Jésus, ni le Père. Pourtant, le Seigneur a affirmé : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20, 29).
Cet amour se manifeste de façon très concrète par la proclamation de l’Évangile, parole de vie qui nous transforme. Accueillir la Parole de vie modifie du tout au tout la manière avec laquelle nous allons nous comporter avec les autres, orienter notre existence, répondre à une vocation à laquelle le Seigneur nous appelle, que ce soit dans notre vie de célibataire, mais aussi dans le mariage ou dans la vocation sacerdotale ou religieuse. C’est le chemin de sainteté auquel Jésus nous appelle, quel que soit notre état de vie.
Cet amour appelle cependant une réciprocité de notre part : c’est la foi, c’est-à-dire la confiance que nous plaçons dans le Seigneur, qui est la manifestation de notre amour pour lui. Jésus dit bien : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et chez lui nous nous ferons une demeure ».Cette promesse est forte, car le terme « demeurer » exprime une proximité profonde et permanente : Dieu qui vient demeurer en nous si nous avons la foi.
Dans quelques instants, je vais vous imposer les mains en priant, comme l’ont fait les apôtres. Je marquerai votre front avec le Saint Chrême, l’huile sainte en disant : « Accipe signaculum Doni Spiritus Sancti » ; « Sois marqué de l’Esprit Saint, le don de Dieu. » Cette onction exprime précisément l’engagement du Seigneur à demeurer en vous. Dieu s’engage à votre égard, chers confirmands : il vous confirme dans votre foi et accueille votre démarche en vous comblant des dons de l’Esprit Saint.
Quels sont ces dons ?
Nous connaissons les sept dons de l’Esprit Saint que je nommerai dans la prière de confirmation. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, certains de ces dons apparaissent clairement et je veux les souligner, car ils me semblent pertinents dans le contexte actuel.
Le premier est le lien d’amour qui nous unit à Dieu qui vient demeurer en nous comme je viens de l’exprimer. Il nous faut aujourd’hui remettre l’amour de Dieu au cœur de notre vie pour ne pas nous laisser abuser par les idéologies qui traversent la société. Vient ensuite la paix, comme le dit Jésus : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas à la manière du monde. ». La paix du Seigneur ne se confond pas en effet avec la simple tranquillité ou l’absence de conflits, elle est d’un autre ordre.
Certaines lettres que vous m’avez adressées pour solliciter la confirmation expriment, d’une manière ou d’une autre, cette paix intérieure que vous avez pu ressentir, même physiquement avec une joie profonde : la paix que l’on ressent en entrant dans une église ; ou dans le silence de l’oraison ; la paix née de la découverte ou la redécouverte de l’Évangile ; la paix que l’on éprouve dans un temps de prière personnelle ; la paix qui nous a soulagés dans un deuil.
Cette paix que le Seigneur nous donne et qui nous enracine dans l’espérance. L’espérance que Jésus exprime dans ce texte quand il dit : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé ou effrayé. » Dans la vie du monde actuellement, il y a beaucoup de choses qui nous effraient, les guerres, le changement climatique, les évolutions sociétales comme on le voit en ce moment avec la loi sur la fin de vie, mais cette paix divine fonde notre espérance au milieu de tout cela.
En cette année jubilaire, nous sommes appelés à être des pèlerins d’espérance. Être pèlerin d’espérance ne consiste pas à se persuader que tout ira bien ou mieux demain ; ce n’est pas une question psychologique. C’est la certitude dans la foi que le mal et la mort n’auront pas le dernier mot dans notre humanité. Nous en sommes certains.
Nous croyons que Jésus reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts et que son Règne n’aura pas de fin. Cet avènement glorieux, dont nous ignorons quand il aura lieu, sera la victoire définitive sur le mal et sur la mort. Ce qui nous donne cette espérance, c’est qu’elle se fonde sur la victoire du Christ sur la mort, vivant pour toujours et sur l’expérience que nous faisons du don de l’Esprit Saint qui fait de nous des témoins fidèles jusqu’à son retour.
L’Esprit Saint nous donne la force de progresser dans une vie sainte. Le Seigneur s’appuie sur notre humanité, et même sur nos fragilités, et j’ajouterai même nos blessures profondes que nous n’effaçons pas facilement. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus disait : « Tout est grâce » alors même qu’elle était très malade et qu’elle souffrait ! Si nous avons la foi, le Seigneur accomplit beaucoup de choses avec notre vie telle qu’elle est.
Laissons-nous guider par l’Esprit Saint, que ce soit par la prière, par notre vie d’Église, par notre vie sacramentelle, et en participant à la messe, nous sommes promis à la vie éternelle avec le Christ, au-delà de notre mort.
Frères et sœurs, que le don de l’Esprit Saint que les confirmands vont recevoir en plénitude se répande sur vous et vos familles et plus largement sur tous les habitants de notre diocèse. Ils sont nombreux ceux qui ne connaissent pas encore le Christ. Puissent-ils découvrir la joie et l’espérance dont le Seigneur nous comble, en particulier en cette année jubilaire où nous sommes appelés à être, dans ce monde incertain, des pèlerins d’espérance. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon