Ac 2, 11 ; Ps 103 (104) ; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16.23b-26
Frères et sœurs,
Le pape Léon XIV a envoyé un message la semaine dernière aux catholiques de France à l’occasion du centenaire de la canonisation de saint Jean-Eudes, saint Jean-Marie Vianney et sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.
J’ai l’impression que ces derniers temps le Seigneur nous parle à travers une coïncidence de dates. La mort du pape François au moment de la fête de la Résurrection du Christ, l’élection de Léon XIV le 8 mai, jour de l’anniversaire de la fin de la 2e guerre mondiale, et maintenant cette lettre du Pape pour cet anniversaire de trois grands saints français dans laquelle il nous appelle à raviver notre espérance et à susciter un nouvel élan missionnaire.
Le pape Léon XIV nous dit dans cette lettre : « Il ne saurait y avoir de plus beau et de plus simple programme d’évangélisation et de mission pour votre pays : faire découvrir à chacun l’amour de tendresse et de prédilection que Jésus a pour lui, au point d’en transformer la vie. »
C’est un magnifique message qui nous est adressé au moment où nous fêtons ce long travail de discernement synodal qui nous a conduits à promulguer de nouvelles orientations pour la mission dans notre diocèse.
Et comme nous sommes dans l’accueil des signes que le Seigneur nous donne, notons au passage que le pape Léon XIV a pris l’image du phare, la lumière du Christ qui rayonne dans son Église afin qu’elle soit, et je le cite, « l’arche du salut qui navigue sur les flots de l’histoire, phare qui éclaire les nuits du monde ». Ce symbole que nous avons choisi justement pour notre fête avec le phare de la pointe Saint-Mathieu et cette vision : « Accueillons la lumière du Christ et rayonnons ! ».
Les orientations que je viens de promulguer peuvent vous sembler banales dans la mesure où elles sont déjà mises en œuvre ici ou là dans nos paroisses, mais au cours des assemblées et chantiers synodaux que nous avons eus depuis cinq ans, elles sont apparues comme des priorités communes à nous donner pour la mission et nous y avons discerné une insistance du Seigneur pour faire évoluer notre manière de vivre notre mission au sein de nos paroisses. C’est pourquoi je demande que ces sept orientations soient prises en compte dans les projets pastoraux missionnaires de chaque paroisse.
En ce jour de la Pentecôte, nous célébrons la venue de l’Esprit Saint sur les apôtres et le début de la mission de l’Église qui est d’annoncer la Bonne Nouvelle à tous. C’est bien le don de l’Esprit Saint qui nous permet de surmonter tous les obstacles qui se présentent sur notre chemin. Dans l’Évangile de ce jour, Jésus nous annonce que l’Esprit Saint est le « Défenseur qui sera toujours avec nous ». Pourquoi ce qualificatif ? Contre qui nous défend-il ?
D’abord bien sûr contre le Mal avec un grand M ! Ce Mal qui cherche par tous les moyens à empêcher l’œuvre du Salut que Jésus a consacré par son sacrifice sur l’autel de la Croix. Nous avons besoin de ce Défenseur divin pour nous aider dans ce combat à lutter contre le Mal. C’est le combat spirituel que nous avons à mener personnellement, comme Jésus dans les tentations au désert, mais aussi en Église qui souffre des péchés de ses membres et des divisions internes, et plus largement pour « la création tout entière qui gémit dans les douleurs d’un enfantement qui dure encore », comme l’affirme saint Paul (Rm 8, 22).
Mais nous avons aussi besoin de l’Esprit Saint, le Défenseur, pour qu’il nous défende contre nous-mêmes, contre nos peurs et nos réticences à témoigner ouvertement de notre foi. Contre nos difficultés aussi à sortir de ce qui « s’est toujours fait ». En réalité ce sont souvent nos convictions personnelles qui s’expriment et pour lesquelles nous avons du mal à imaginer d’autres manières de faire.
Ces réticences, pour ne pas dire ces obstacles à l’évangélisation, nous les trouvons ici ou là dans chaque paroisse, mais aussi dans certains établissements d’Enseignement catholique. C’est pour cela que nous venons aussi de promulguer au sein de l’Enseignement catholique le 6 mai dernier de nouvelles orientations avec cette vision : « Une école ouverte à tous qui ose… ». Avec de belles intuitions pédagogiques, et également cet appel qui rejoint les orientations promulguées en ce jour : « affermir notre caractère propre : mettre en œuvre l’annonce de l’Évangile auprès de tous, célébrer ensemble et permettre à ceux qui le souhaitent d’emprunter un chemin de foi. »
Aujourd’hui, la progression de la sécularisation dans notre pays semble être arrivée à un seuil, l’histoire le dira. Il est clair que notre société française n’a plus de référence à l’Évangile et cela se vérifie dans l’opinion publique et les lois sociétales qui sont votées d’année en année. Mais désormais, beaucoup de jeunes et d’adultes expriment leur soif de connaître la Bonne Nouvelle du Salut et découvrent avec joie la foi chrétienne, comme en témoigne le nombre toujours plus important de demandes de baptême ou de confirmation.
Notre défi est de les accueillir chaleureusement dans nos communautés, quels que soient leur histoire et leur chemin de vie, et de les accompagner dans leur rencontre avec le Seigneur et dans une vie d’Église authentique. Et eux-mêmes d’ailleurs nous aident à sortir de nos habitudes et à grandir avec eux dans la foi. C’est un don inattendu et même inespéré que l’Esprit Saint nous fait ces temps-ci pour nous pousser à annoncer la Bonne Nouvelle de façon décomplexée, avec humilité et aussi « douceur et respect » comme nous y invite saint Pierre.
Pour accompagner ces demandes et pour les intégrer dans la vie et la mission de l’Église, et mettre en œuvre ces nouvelles orientations, nous avons besoin de tous. À la Pentecôte « chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit », nous dit saint Luc. Que chacun entende l’appel du Seigneur et y réponde généreusement.
Nous avons besoin d’hommes et de femmes qui osent s’engager dans tous les services d’Église. Nous avons aussi besoin de tous ceux qui œuvrent pour faire grandir dans la société la fraternité voulue par Dieu, sans oublier les plus pauvres qui ont aussi leur place à prendre. Comme nous le rappelle saint Luc dans les Actes des Apôtres, l’Esprit Saint « se posa sur chacun d’eux. »
Frères et sœurs nous avons aussi besoin de prêtres et je suis convaincu que des jeunes, ici même sans aucun doute, sont appelés par le Seigneur à devenir en son nom de bons pasteurs. L’Église ne peut pas vivre sans prêtre puisqu’ils agissent au nom du Christ pour notre sanctification.
Nous avons besoin de diacres pour être consacrés à la diaconie de l’Église, nous avons besoin de religieux et de religieuses qui se sentent appelés à donner toute leur vie à Dieu et aux autres. Toutes ces vocations sont plus que pertinentes dans le contexte actuel et nous savons à quel point ces vies données portent du fruit pour le salut du monde.
Le Seigneur ne veut rien faire sans nous, mais nous ne pouvons rien faire sans lui, comme Jésus l’a rappelé à ses disciples. C’est pourquoi, comme l’écrivait le pape François dans son encyclique Dilexit nos : « Je prie le Seigneur Jésus-Christ que jaillissent pour nous tous de son saint Cœur ces fleuves d’eau vive qui guérissent les blessures que nous nous infligeons, qui renforcent notre capacité d’aimer et de servir, qui nous poussent à apprendre à marcher ensemble vers un monde juste, solidaire et fraternel. » (Dilexit nos n° 220)
C’est pourquoi frères et sœurs, en ce jour si important pour notre Église diocésaine, j’ai décidé de renouveler la consécration de notre diocèse au Saint Cœur de Jésus lors du pardon de saint Corentin qui aura lieu le dimanche 14 décembre, au cours duquel nous fêterons également la clôture de l’année jubilaire 2025.
Pourquoi renouveler cette consécration qui avait été promulguée par Mgr LAMARCHE en juin 1889 alors que l’Église de France vivait des heures difficiles ? Et que signifie une telle consécration ?
Le Sacré-Cœur est un symbole du cœur aimant et souffrant de Jésus, ouvert pour l’humanité. En consacrant notre diocèse au Cœur de Jésus, l’Église exprime sa foi dans cet amour rédempteur et sa volonté d’y répondre.
Par cet acte fort, nous demandons à Jésus de protéger notre diocèse, de le guider et de lui accorder des grâces spirituelles, notamment pour la mise en œuvre concrète des orientations que je viens de promulguer. C’est aussi implorer sa miséricorde en réparation des péchés commis dans le diocèse qui sont des offenses faites au Cœur de Jésus.
Ce geste implique un engagement collectif : durant les six mois qui précèdent cette consécration, nous sommes tous invités à vivre davantage selon l’Évangile, à prier, à participer aux sacrements, à propager la foi et à témoigner de la charité chrétienne. Notons que la mise en œuvre des orientations sera un des moyens privilégiés pour nous y préparer.
Frères et sœurs, que ces nouvelles orientations nous stimulent pour « offrir au Cœur du Christ une nouvelle possibilité de répandre en ce monde les flammes de son ardente tendresse » (Dilexit nos n° 200). Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon