Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  30 août 2020 — Pardon de Sainte-Anne-la-Palud (29) Si 44, 1. 10-15 ; Ps 131 ; He 11,1-2 ;8-13 ; Mt 13,11…17

30 août 2020 — Pardon de Sainte-Anne-la-Palud (29) Si 44, 1. 10-15 ; Ps 131 ; He 11,1-2 ;8-13 ; Mt 13,11…17

Frères et Sœurs,

En méditant sur ces textes de l’Écriture qui nous sont proposés pour la fête de Sainte-Anne, j’ai été touché par cette phrase de la lettre aux Hébreux : « La foi est la manière de posséder déjà ce qu’on espère, et de connaître des réalités qu’on ne voit pas. »
Cette phrase, qui nous ouvre une fenêtre vers l’au-delà, résonne d’une manière particulière dans le contexte actuel d’un monde bouleversé et qui nous fait entrevoir l’avenir avec beaucoup d’incertitude.
Incertitude liée à la pandémie de Covid-19 dont nous n’avons pas encore mesuré les conséquences économiques, mais aussi sur la vie des personnes. Les peurs, les angoisses qu’elle suscite !
Incertitude sur le réchauffement climatique de notre planète et ses conséquences dont nous commençons à mesurer l’impact sur les populations et qui nous ouvre un avenir inquiétant.
Incertitude sur l’avenir de notre planète. La question des ressources dont les scientifiques nous disent que nous en épuisons plus que ce qu’elle est capable de produire naturellement.

Je ne vais pas allonger la liste et vous faire une description détaillée de ces défis dont les médias font état en permanence et qui distillent inévitablement une certaine angoisse dans la population. Au contraire, je veux souligner à quel point la foi, fait de nous des témoins de l’espérance et que cela nous fait tenir debout, en nous poussant à être solidaires et agissants au cœur de cette humanité !
« La foi est la manière de posséder déjà ce qu’on espère. » dit l’auteur de la lettre aux Hébreux. Mais qu’est-ce que nous espérons au juste ? Saint-Pierre affirme que, selon la promesse du Christ, nous espérons « un ciel nouveau et une terre nouvelle où résidera la justice » (2 P, 3, 13). Et le catéchisme de préciser : « Nous ignorons le temps de l’achèvement de la terre et de l’humanité, nous ne connaissons pas le mode de transformation du cosmos. Elle passe, certes, la figure de ce monde déformée par le péché ; mais nous l’avons appris, Dieu nous prépare une nouvelle demeure et une nouvelle terre où régnera la justice et dont la béatitude comblera et dépassera tous les désirs de paix qui montent au cœur de l’homme » (GS 39, § 1). (Catéchisme de l’Église catholique n° 1048)
Cela ne signifie surtout pas que nous devons jeter l’éponge et attendre les bras croisés la fin du monde et l’avènement du Christ, bien au contraire. Dans la lettre aux Hébreux, nous lisons : « Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qui devait lui être donné comme héritage. Et il partit sans savoir où il allait. » C’est-à-dire qu’il se laissait conduire par l’Esprit de Dieu et il se mettait à son service. Par la foi, il exprimait sa totale confiance au Seigneur, car il avait pensé, avec sa femme Sara, que Dieu serait fidèle à sa promesse.

Nous ne sommes pas les premiers chrétiens de Bretagne à regarder le terme pour mieux vivre le présent. En regardant les taollenou, ces tableaux de mission du 17e siècle que le vénérable Michel LE NOBLETZ et le bienheureux Julien MAUNOIR utilisaient pour transmettre la foi à leurs fidèles, nous constatons qu’ils parlaient beaucoup de l’enfer et du Paradis, et donc du jugement dernier, pour appeler à la conversion et à la foi. Par là même, ils montraient que par la foi, nous pouvons « connaître des réalités qu’on ne voit pas », et que cette perspective, même si elle peut nous paraître lointaine, est comme une lumière qui éclaire notre navigation au milieu des récifs.
Dans le contexte actuel d’incertitude, il me semble donc important de raviver en nous deux aspects de notre foi qui peuvent nous donner du souffle et faire de nous des témoins de l’espérance dans un monde qui semble déboussolé :

  1. Raviver en nous l’attente de la Parousie du Christ, c’est-à-dire de son Avènement glorieux à la fin des temps et du renouvellement de la Création. Nous avons la certitude que Jésus a définitivement vaincu la mort, qu’il est vivant et continue son œuvre de Rédemption de l’humanité tout entière.
    Nous croyons que le Royaume de Dieu est déjà en germe au milieu de nous et qu’il trouvera son plein accomplissement à la Parousie. Cette perspective doit nous stimuler pour nous convertir nous-mêmes et pour annoncer cette Bonne Nouvelle au plus grand nombre. Si nous croyons cela, nous ne pouvons pas être déprimés et anxieux face à l’avenir. Tout en étant lucide évidemment sur les défis que nous avons à surmonter sur cette terre, et que j’ai évoqués au début, le Seigneur nous pousse à nous engager résolument à être des témoins de ce qu’il nous promet pour l’avenir. « Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui est en vous devant quiconque vous en demande raison. » comme nous le demande Saint-Pierre (1 P 3, 15).
  2. Dans le contexte actuel de pandémie, notre Église doit devenir un « hôpital de campagne » selon l’expression du pape François. C’est-à-dire un lieu où les personnes blessées par la vie peuvent trouver un réconfort matériel, moral et spirituel. Et quand je parle de blessés de la vie, cela peut être des personnes qui manquent du nécessaire, mais aussi de ceux qui ont perdu leur boussole et qui ont besoin de retrouver un espoir, de ceux qui souffrent de la solitude ou de la maladie.
    L’Église a toujours été très engagée pour le service des plus pauvres même quand elle vivait elle-même de graves crises. La situation actuelle doit nous mobiliser encore davantage. N’oublions pas aussi de leur apporter la joie de l’espérance dont ils ont tant besoin. La période de confinement nous a fait davantage prendre conscience que le soutien moral était aussi vital que les soins médicaux. Et pour nous, le soutien moral trouve sa force dans la proclamation de l’Évangile et dans une vie en communion avec le Christ.

La statue de Sainte-Anne qui est dans la chapelle, la représente en train de montrer les Écritures à sa fille. Elle lui transmet la joie de l’espérance. Qu’elle nous aide, par sa prière, à être nous-mêmes des témoins vivants de cette espérance auprès de nos enfants et de ceux que nous rencontrons chaque jour. AMEN.

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon