Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  7 mars 2021 — 3° dimanche de Carême — 1er scrutin — Sizun (29)

7 mars 2021 — 3° dimanche de Carême — 1er scrutin — Sizun (29)

Ex 17, 3-7 ; Rm 5, 1-2.5-8 ; Jn 4, 1-43

Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement

Chers Catéchumènes,
Chers Frères et Sœurs,

Comme nous venons de l’entendre, ce sont les textes de l’année A qui nous ont été donnés aujourd’hui pour nourrir le premier scrutin. Dans le RITUEL, il y a une petite introduction qui nous précise ce que sont les scrutins : « les scrutins […] ont ce double but : faire apparaître dans le cœur de ceux qui sont appelés ce qu’il y a de faible, de malade et de mauvais pour le guérir et ce qu’il y a de bien, de bon et de saint, pour l’affermir. »
Nous pourrions accueillir aussi cette parole pour nous-mêmes, qui sommes déjà baptisés… Effectivement, le carême est un temps pour scruter notre vie sous le regard du Seigneur, pour nous guérir et nous affermir dans notre foi !

L’Évangile qui vient nourrir ce premier scrutin est celui de la Samaritaine. Dans sa rencontre avec Jésus, plusieurs gestes ou paroles viennent nous toucher au plus profond de nous-mêmes pour nous aider à scruter note existence sous le regard du Christ, lui qui ne veut pas la mort du pécheur, mais « qu’il se convertisse et qu’il vive. » (Ez 33, 11)

Nous notons d’abord l’attitude de Jésus. Une attitude pleine d’humanité « Jésus, fatigué par la route, s’était donc assis près de la source », il demande à boire. Il ne se présente pas à cette femme en maître, mais il se fait humble et pauvre. Il lui demande un peu d’eau. Face à ce qu’il y a de faible, de malade ou de mauvais en nous, il est important de ne pas se tromper sur le regard du Christ sur nous. Saint Paul nous rappelle à quel point le Christ nous aime : « Or, la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs. » (Rm 5, 8) Même ceux qui pensent être très loin du Seigneur, à l’image de la Samaritaine, peuvent découvrir à quel point il nous aime. Je pense que pendant le carême, nous avons à contempler cet amour humble du Christ qui vient nous rejoindre dans notre pauvreté, dans notre faiblesse.

Ensuite, Jésus demande un peu d’eau, mais la Samaritaine est méfiante… Un Juif ne fréquente pas les Samaritains, considérés comme pécheurs et idolâtres. Cependant, Jésus franchit le pas (et nous voyons cette attitude du Christ dans tout l’Évangile par exemple vis-à-vis de Zachée ou encore Matthieu, publicains et pécheurs) et vient parler à cette Samaritaine, alors que cela ne se faisait pas. Là aussi, la Samaritaine va être touchée par la réponse de Jésus sur l’eau vive, qui apparaît déjà comme une promesse : « celui qui boit de l’eau que je lui donnerai… »
De fait, nous sommes appelés à scruter dans notre vie ce qui fait obstacle à cette rencontre avec Jésus : nos a priori, nos certitudes, parfois aussi nos doutes entretenus (cf. ceux qui affirment d’emblée : « je ne suis pas croyant », ou encore « je suis comme ça et je ne changerai pas ».)
Cette méfiance bloque toute recherche sincère de la vérité et toute rencontre vraie avec le Christ. Même si nous nous disons croyants, scrutons bien les méfiances qui demeurent en nous, les résistances à la grâce telles les habitudes, pas forcément bonnes, ou encore les convictions personnelles sur tel ou tel sujet, tel ou tel aspect de la foi, pour lesquelles nous sommes tellement convaincus que nous n’avons pas de place pour la recherche de la vérité. Ce texte nous invite à chercher la vérité.

Jésus ouvre également cette femme à désirer le don de Dieu. Il ne l’impose pas. Il ne lui dit pas « bois plutôt l’eau que je vais te donner. » Mais au contraire : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : “Donne-moi à boire”, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. » Il laisse un espace de liberté pour la réponse. Il ouvre le cœur de cette femme à désirer cette eau : « Seigneur, donne-moi de cette eau. », dit-elle, même si elle n’a pas encore compris de quoi il s’agissait, elle sera tout de même exaucée !
En ce Carême, faisons grandir en nous ce désir d’accueillir le don de Dieu, de nous laisser abreuver par le Christ de cette eau vive. Cette eau qui représente l’Esprit saint : elle nous purifie, lave nos souillures, notre péché. Elle nous transforme (cf. Saint Cyrille de Jérusalem qui nous dit que l’Esprit saint fait grandir la vie sous des formes multiples). L’eau s’adapte à chacun et nous fait grandir dans la vie chacun selon nos charismes. C’est une « Source jaillissant pour la vie éternelle. ». Pour le désirer, ce don de Dieu, il faut le demander comme cette femme : « Seigneur, donne-moi de cette eau… » Et comme le dit Jésus dans un autre passage : « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit saint à ceux qui le lui demandent ! » (Lc 11, 5-13). Dans ce Carême, nous avons à demander l’Esprit Saint, le don de Dieu.

Enfin, Jésus scrute la vie de la Samaritaine, mais sans la juger ni la condamner. C’est beau, la manière dont il s’exprime : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari. Des maris, tu en as eu cinq et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari. Là, tu dis vrai. » Jésus fait jaillir la vérité et la femme la reconnaît, sans chercher à s’expliquer ou se justifier, et elle dit : « Seigneur, je vois que tu es un prophète… » et, à partir de là, sa foi en Jésus va grandir jusqu’à ce qu’elle reconnaisse en lui le Messie annoncé.

Chers catéchumènes, scrutez au fond de vous-même ce qui fait encore obstacle à l’amour de Dieu et recevez aussi la grâce d’en être libérés et purifier ainsi que nous l’entendrons tout à l’heure dans la prière d’exorcisme. Par le baptême, bien sûr, vous recevrez le pardon de tous vos péchés pour une vie nouvelle dans le Christ !
Et nous qui sommes déjà baptisés, laissons-nous scruter par le Seigneur pendant ce Carême, faisons avec lui la vérité sur ce que nous avons vécu de mal, sur nos mauvais comportements et à demander et recevoir la grâce du baptême en particulier par le Sacrement de pénitence et de réconciliation par lequel Jésus nous fait boire à la source d’eau vive ! Ne négligeons pas ce sacrement qui est un don de Dieu !

Enfin, la Samaritaine, après sa joyeuse rencontre avec le Christ, va partir en laissant sa cruche pour annoncer la Bonne Nouvelle aux gens de la ville. Elle a trouvé la vraie source d’eau vive, celle qui rejaillit en vie éternelle et elle est aussi une source d’eau vive pour les autres ! Nous aussi, nous sommes appelés à témoigner de notre foi. Amen.

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon