Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  22 avril 2025 — Messe pour le pape François au lendemain de son décès — Mardi de l’Octave de Pâques — Cathédrale Saint-Corentin — Quimper (29)

22 avril 2025 — Messe pour le pape François au lendemain de son décès — Mardi de l’Octave de Pâques — Cathédrale Saint-Corentin — Quimper (29)

Ac 2, 36-41 ; Ps 32 (33) ; Jn 20, 11-18 (Textes du jour)

Frères et sœurs,

J’ai choisi de garder les textes du jour, car le Pape est mort hier matin au tout début de cette Octave de Pâques durant laquelle nous célébrons chaque jour la Résurrection du Christ. Le Pape meurt aussi au cœur de cette année jubilaire qu’il a voulu axée sur l’espérance qui « ne déçoit pas ». Une espérance dont notre monde a tant besoin et qui trouve sa source justement dans la victoire de Jésus sur la mort. Enfin, ses obsèques auront lieu samedi, veille du dimanche de la miséricorde. Cette miséricorde à laquelle il était très attaché au point d’en faire sa devise épiscopale « miserando atque eligendo » (Choisi parce que pardonné). Tout cela est un beau signe d’espérance que le Seigneur donne à son Église et au monde. Cette coïncidence des dates donne à la mort de notre pape François une lumière pascale et, nous l’espérons, le signe de son entrée dans la vie, comme le disait si bien Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus que le pape affectionnait particulièrement. 

Il se trouve que la première lecture nous rapporte le discours de l’apôtre Pierre qui s’adresse à la foule le jour de la Pentecôte. En méditant ce passage, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à son successeur, le pape François, lorsqu’il s’adressait aux foules, que ce soit aux Journées Mondiales de la Jeunesse, au cours de ses visites dans différents pays, ou récemment à Marseille et en Corse.

Le cœur de ses messages était le même que celui de saint Pierre même si le contexte était différent, bien évidemment ! Mais sa parole rejoignait pleinement celle de saint Pierre, comme il le proclamait par exemple dans son exhortation apostolique La Joie de l’Évangile : « Jésus Christ t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant il est vivant à tes côtés chaque jour pour t’éclairer, pour te fortifier, pour te libérer » (n° 164).

En effet, saint Pierre ne fait pas seulement qu’annoncer aux habitants de Jérusalem la résurrection de Jésus dont il a été un témoin direct, il fait comprendre à la foule que la victoire de Jésus sur la mort les concerne aussi. Il les appelle pour cela à se convertir, à recevoir le baptême pour le pardon de leurs péchés et il leur promet alors le don de l’Esprit Saint. Et cette promesse est non seulement pour ceux qui l’écoutent dit saint Pierre, mais aussi pour leurs enfants« et pour tous ceux qui sont loin, aussi nombreux que le Seigneur notre Dieu les appellera. »

Cette vie nouvelle que saint Pierre avait annoncée, nous en avons encore été témoins lors de la Vigile Pascale avec les nombreux catéchumènes que nous avons eu la joie de baptiser et de confirmer. La puissance de la Résurrection continue de se manifester dans la vie de millions de personnes qui ont reconnu en Jésus, Dieu qui nous aime et qui est venu nous sauver du mal et de la mort.

C’est désormais pour le pape François l’heure de vivre pour lui-même le passage de la mort à la vie avec le Christ qu’il n’a cessé de prêcher. C’est le moment pour lui de faire l’expérience de la miséricorde du Seigneur et de la joie de l’Évangile qu’il a si bien exprimée dans son exhortation apostolique.

Depuis hier, les médias du monde entier relatent sa vie avec ses nombreuses interventions, mais aussi ses visites dans les pays, ses gestes symboliques. Je ne vais pas en faire ici l’inventaire, ce n’est d’ailleurs pas le lieu, mais je voudrais souligner trois choses qui ont marqué son pontificat et qui nous ont aidés à grandir dans la fidélité à l’Évangile et qui continuent de nous inspirer.

  1. Le pape François était le premier Pape, depuis l’origine de l’Église, issu d’un autre continent que l’Europe. Et pas n’importe lequel, celui d’Amérique Latine. C’est le signe que depuis quelques décennies, l’Église est devenue vraiment universelle et que son centre de gravité s’est déplacé vers l’Amérique Latine, mais aussi l’Afrique et l’Asie.

Cela montre à quel point la parole de saint Pierre du jour de la Pentecôte se réalise, à savoir que la promesse de Salut vient toucher « tous ceux qui sont loin ». Cela peut dérouter parfois notre mentalité occidentale, mais elle est un signe magnifique que le Salut de l’humanité voulu par Dieu est en train de se réaliser. Nous devons accueillir ce signe pour grandir dans la foi et dans la confiance en l’Église du Christ. 

  • La vie et l’expérience que le pape François avait vécues auprès des plus pauvres en Argentine l’ont conduit à nous rappeler sans cesse, de façon parfois provocante, et en ce sens prophétique, à ne pas oublier les pauvres et ceux qui vivent dans des conditions indignes en raison des guerres, des catastrophes naturelles, liées pour une part au changement climatique, et de toutes les injustices, en soulignant notamment qu’il n’y avait jamais eu, dans l’histoire de l’humanité, autant de personnes obligées de quitter leur pays pour trouver un lieu pour vivre dans des conditions dignes.

D’ailleurs son encyclique Laudato Si’ traitait bien d’écologie, mais d’une écologie intégrale, à savoir le respect de la dignité humaine de sa conception jusqu’à sa mort naturelle, au sein de la création tout entière reconnue comme œuvre de Dieu. Nous n’avons pas fini de méditer ce texte qui est un appel à adorer Dieu, non seulement par notre bouche et notre cœur, mais aussi par notre comportement envers les autres et envers la création. Cette encyclique a trouvé une suite dans son autre encyclique Fratelli Tutti, tous frères.

  • Dans son exhortation apostolique Evangelii Gaudium, la Joie de l’Évangile, il nous a appelés à être des disciples-missionnaires et à témoigner au plus grand nombre notre joie de croire. Alors que nous allons célébrer à la Pentecôte une grande fête à Brest à l’occasion de la promulgation de nos orientations diocésaines, le pape François restera pour les chrétiens de notre diocèse une source d’inspiration et d’encouragement. Il nous aide ainsi à vivre notre conversion missionnaire qui passe notamment par l’accueil et l’accompagnement de nombreux adultes et jeunes qui, comme le jour de la Pentecôte il y a 2000 ans, demandent à recevoir le baptême.

Je terminerai par ce vœu que le pape François a exprimé à la fin de son encyclique Dilexit nos sur l’amour humain et divin du Cœur de Jésus Christ, et qui résume en quelques mots tout ce qu’il a voulu transmettre à l’Église et au monde durant son pontificat. Accueillons ces vœux du pape François comme son testament spirituel : « Je prie le Seigneur Jésus-Christ que jaillissent pour nous tous de son saint Cœur ces fleuves d’eau vive qui guérissent les blessures que nous nous infligeons, qui renforcent notre capacité d’aimer et de servir, qui nous poussent à apprendre à marcher ensemble vers un monde juste, solidaire et fraternel. Et ce, jusqu’à ce que nous célébrions ensemble, dans la joie, le banquet du Royaume céleste. Le Christ ressuscité sera là, harmonisant nos différences par la lumière jaillissant inlassablement de son Cœur ouvert. Qu’il soit béni ! » (Dilexit Nos n° 220). Amen.

† Laurent DOGNIN 
Évêque de Quimper et Léon