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24 août 2025 — Pardon de Notre-Dame des Portes — Messe solennelle (Châteauneuf-du-Faou) (29)

Is 66, 18-21 ; Ps 116 ; He 12, 5-7.11-13 ; Lc 13, 22-30 (21e Temps Ordinaire — C)

Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement

Frères et sœurs,

Je disais hier soir que notre pardon de Notre-Dame des Portes se situe cette année au cœur de l’année jubilaire des 2025 ans de la naissance du Christ. Une année que le pape François a placée sous le signe de l’espérance dans un monde marqué par la violence, les guerres et les inquiétudes face aux changements climatiques. Il nous invitait à être des pèlerins de l’espérance en ce monde en ravivant l’espérance. Ce qui signifie que beaucoup l’ont perdue, y compris des chrétiens, et qu’il est nécessaire de retrouver les sources de notre espérance. 

En cette messe qui marque la deuxième étape de notre pardon, les lectures de ce jour nous introduisent au cœur de notre espérance chrétienne, à savoir l’Avènement du Christ à la fin des temps, avec aussi le défi d’entrer dans son Royaume éternel. Nous pourrions alors donner à la Vierge Marie le titre de Notre-Dame de la Porte étroite, car elle nous aide aussi à y entrer ! C’est ce thème que je souhaite aborder maintenant.

D’abord, Jésus dans l’Évangile de ce jour évoque le salut. Mais qu’est-ce qu’il entend par là ? 

Il évoque ce que nous proclamons dans le Credo… « Il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et les morts et son Règne n’aura pas de fin. » Autrement dit, il nous révèle qu’il y aura une fin à ce que nous vivons sur la terre. Il l’évoque à plusieurs reprises dans les Évangiles. Il y aura bien une fin du monde dans lequel nous vivons. Jésus affirme que nous ne savons ni le jour ni l’heure, mais qu’elle arrivera à l’improviste. Cela peut être demain… ou dans mille ans !

En quoi cela peut-il nous combler d’espérance ? 

C’est que Jésus ne présente pas cette fin comme la victoire du mal et de la mort ni comme la disparition de toute vie, le néant. Au contraire, il prend même ici l’image d’un « festin dans le Royaume des Cieux » dans lequel prendront place des personnes venant « de l’orient et de l’occident, du nord et du midi », donc de partout. Un festin c’est joyeux, c’est convivial !

Le terme « royaume des Cieux » ne signifie pas que c’est un lieu situé dans les nuages, tel qu’il est parfois représenté dans les œuvres artistiques sur le Paradis. Le Royaume des Cieux n’est pas de ce monde comme le disait Jésus à Pilate. Il désigne plutôt le Royaume où le mal est éradiqué et où ne règne plus que la paix, la justice et l’amour. La forme que pourrait prendre ce Royaume reste inconnue pour nous et on ne peut pas l’imaginer, mais sa venue est certaine. 

Alors, le fait de croire et d’espérer l’Avènement du Christ à la fin des temps, ne risque-t-il pas de nous faire rêver à un monde meilleur et de nous détourner de la vie réelle et des défis que nous devons surmonter dans cette humanité ? 

Bien au contraire ! Dans l’Évangile de ce jour, Jésus nous montre que c’est maintenant que nous devons nous préparer et agir dans cette humanité pour que l’amour du Christ règne dans les cœurs et transforme les relations entre les personnes. « Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice », dit Jésus. Cela veut dire que nous serons jugés sur l’amour. C’est par l’amour que nous pourrons passer par la porte étroite. Sans amour, c’est impossible !

C’est pourquoi depuis les premiers temps de l’Église, les chrétiens s’efforcent de prendre soin des personnes en souffrance dans des œuvres caritatives, en fondant des écoles, des orphelinats, des dispensaires, des hôpitaux, des maisons de personnes âgées. En France, beaucoup de ces institutions ont été reprises par l’État ou des associations, mais ce n’est pas le cas dans beaucoup d’autres pays où l’Église est souvent la seule institution qui tient debout face à des États défaillants. 

Autrement dit, l’espérance de l’Avènement du Christ et de sa victoire sur les le mal et la mort nous pousse à nous engager maintenant et à donner notre vie pour nos frères comme Jésus a donné sa vie pour nous. 

Mais revenons à la porte et surtout à la « porte étroite » !

Pourquoi Jésus affirme-t-il que « beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas » ? Il donne cette image de la « porte étroite » qui évoque à la fois que cette porte n’est pas évidente à trouver, et qu’en plus elle est difficile à franchir !

Cela montre que s’engager à suivre le Christ et à mettre en œuvre ce qu’il nous demande dans les Évangiles, n’a rien d’évident. D’abord parce qu’il faut trouver la porte, c’est-à-dire avoir la connaissance de ce que Jésus nous a révélé, de ce qu’il nous demande. Cela passe par la catéchèse, la formation pour tous les âges. Ensuite il faut avoir envie de franchir cette porte, c’est la foi, c’est-à-dire la confiance que nous mettons dans les paroles du Seigneur et l’audace de les mettre en œuvre dans notre vie. Soutenus par la vie sacramentelle, la vie de prière.

Tout cela reste très actuel. Le fait même de nous mettre au service des autres pour leur bien, fait de nous des pèlerins d’espérance. Les sociologues nous disent à quel point notre société devient très individualiste en mettant l’intérêt des individus au-dessus du bien commun. Comme chrétiens, nous avons à aller à contre-courant de cette manière de voir, car le Seigneur nous a donné l’Esprit Saint en vue du bien de tous. 

Et pour cela, nous devons donner généreusement notre vie pour nos frères à la suite de Jésus et avec Lui. C’est cette attitude qui nous permet d’entrer par la porte étroite. Or il faut être courageux pour aller à contre-courant de cette mentalité individualiste, y compris contre nous-mêmes, nos désirs de bien-être à tout prix, même si c’est au dépens du bien commun de notre couple, de notre famille, ou encore de notre commune comme je l’entends souvent de la part des maires de ces communes.  

Je disais au début que la Vierge Marie pouvait aussi être nommée Notre-Dame de la Porte étroite. Pourquoi ?

Parce qu’elle est notre mère bien-aimée et qu’elle nous soutient dans nos épreuves. Elle nous montre aussi où se trouve cette porte qui donne accès au royaume de Dieu. Elle nous invite à croire en Jésus. Elle est pour nous le modèle du disciple, car elle a mis sa foi dans la Parole du Seigneur et elle s’est rendue disponible pour donner le Christ au monde. 

Frères et sœurs, en ce grand pardon de Notre-Dame des Portes, confions-nous à la Vierge Marie pour qu’elle nous aide à trouver cette porte étroite et à la passer pour entrer avec elle dans le royaume. Confions-lui nos familles, confions-lui la paroisse et ses pasteurs. Confions-lui notre Église et notre humanité qui est bien en souffrance en ce moment. Que la Vierge Marie nous aide à devenir des pèlerins d’espérance auprès de tous ceux que nous rencontrons. Amen.

† Laurent DOGNIN 
Évêque de Quimper et Léon