Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  8 septembre 2025 — Fête de la Nativité de la Vierge Marie — 80 ans de présence des Sœurs de l’Institut de l’Agneau de Dieu dans le diocèse — Église Saint-Marc (Brest) (29)

8 septembre 2025 — Fête de la Nativité de la Vierge Marie — 80 ans de présence des Sœurs de l’Institut de l’Agneau de Dieu dans le diocèse — Église Saint-Marc (Brest) (29)

Rm 8, 28-30 ; Ps 12 (13) ; Mt 1, 18-23

Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement

Mes chères sœurs, chers amis,

    C’est en cette fête de la Nativité de la Vierge Marie que nous célébrons les 80 ans de votre Institut. Déjà en soi, c’est un beau signe, puisque la Vierge Marie fut à l’origine du Salut de l’humanité. C’est quelque chose de considérable. Et pourtant, elle l’a vécu dans une vie si discrète, si humble, au point que sa naissance n’est même pas mentionnée dans les Évangiles. Ce n’est que dans les évangiles apocryphes que l’on en trouve le récit.
    Si je fais ce rapprochement, c’est parce que votre Institut s’est lui aussi fondé dans l’humilité, comme vous l’avez rappelé, Sœur Marie Pascale, sur les ruines encore fumantes de Brest, au lendemain de la guerre. Le Père René-Marie de la CHEVASNERIE a eu cette intuition : après le désastre de la guerre, il fallait recentrer sa vie sur la personne vivante du Christ, afin que chacun puisse y puiser à la source de sa vocation. Il entrevoyait des vocations dans divers états de vie, et c’est le symbole biblique de l’Agneau qu’il a retenu comme une image forte du Mystère du Salut.
    L’Agneau de Dieu immolé exprime clairement le sacrifice de Jésus qui donne sa vie. D’un point de vue humain, cette image n’a rien de fort puisqu’il s’agit d’un sacrifice, d’une mort. Et pourtant, c’est bien cet Agneau sacrifié qui sauve le monde. Plus que jamais, votre Institut se reconnaît dans les traits de Jésus, l’Agneau sacrifié. Le Père de la CHEVASNERIE discernait en lui les traits du Christ, serviteur doux et humble de cœur, et c’est ce signe que vous portez davantage aujourd’hui peut-être.

    Le monde pourrait ne voir dans votre Institut qu’une communauté en fin de vie. Mais les croyants que nous sommes y voient le magnifique témoignage que vous avez donné depuis 80 ans en donnant votre vie à la manière du Christ. Agneau sacrifié, mais ô combien source de vie par toutes les formes du service, en France, au Cameroun, aux États-Unis ou au Mexique.
    Il ne nous appartient pas de dresser l’inventaire des fruits apportés par votre Institut. Mais il est certain que Jésus, l’Agneau immolé, « Dieu avec nous », « le Seigneur qui sauve », comme il est révélé à Joseph dans l’Évangile, s’est manifesté dans vos vies et par vos vies, vous qui êtes ses servantes.
    Avec l’âge des sœurs, la manière de servir évolue. Vous l’aviez d’ailleurs exprimé dans vos chapitres précédents en soulignant que le cœur de votre vocation demeurait intact. Je veux souligner justement à quel point votre charisme est toujours actuel puisqu’il rejoint, au moins dans quatre aspects, les orientations que j’ai promulguées à la Pentecôte, fruits d’un long travail synodal dans le diocèse pour discerner ce que le Seigneur attend de nous aujourd’hui.
    Ainsi, les quatre orientations suivantes rejoignent votre intuition fondatrice :

    Première orientation : « Accueillir et accompagner toutes les situations de vie. »
    Le Père de la CHEVASNERIE avait compris qu’il fallait que l’Institut accueille aussi des religieuses ayant des problèmes de santé, un handicap ou encore des veuves, ce que les congrégations ne faisaient pas à cette époque. Accueillir tout le monde, afin que chacun puisse vivre sa vocation. Merci de nous avoir donné ce témoignage depuis 80 ans et qui nous encourage à continuer à mettre en œuvre cette intuition renouvelée pour l’ensemble de l’Église et pour l’ensemble des vocations.

    Deuxième orientation : « Vivre un compagnonnage avec les plus pauvres. »
    Votre vocation vous a toujours poussées à accueillir les plus pauvres, afin qu’ils se sentent vraiment chez eux dans l’Église. Votre Institut est comme une porte de l’Église ouverte vers les plus pauvres.

    Troisième orientation : « Développer de Petites Fraternités Chrétiennes Locales. »
    Dès le départ, votre intuition a été de répondre aux appels variés de la mission par des fondations de petites communautés plus proches des gens. À l’origine, il s’agissait de petites communautés religieuses ; aujourd’hui, cette intuition nous l’avons actualisée pour de petites fraternités qui rassemblent localement des personnes de tous états de vie, pour prier, partager la Parole de Dieu et se soutenir fraternellement. Cela pour que la Bonne Nouvelle se répande jusque dans les lieux les plus pauvres, comme actuellement le milieu rural ou les quartiers déchristianisés.

    Quatrième orientation : appeler chaque personne à servir.
    Vous portez ce nom de « servantes » de l’Agneau de Dieu. C’est une manière de donner sa vie pour les autres, comme Jésus l’a donnée pour nous. Dans une société où l’on valorise de plus en plus la personne individuelle, à sa propre personne, parfois au détriment du Bien Commun, le don que vous avez fait de votre vie pour servir est un magnifique témoignage que vous nous donnez et qui nous encourage tous à faire de même, selon notre vocation et notre état de vie. Nous mettre au service des autres !

    Pendant 80 ans, votre vie dans cet Institut, celle des religieuses qui vous ont précédées et la vôtre aujourd’hui, est comme une graine plantée dans la vie de l’Église, dans cette belle région du Finistère et dans les autres pays où vous avez été envoyées. Une graine plantée dans la vie de l’Église et dans la vie de nombreuses personnes, croyants, peut-être même de non-croyants. Comme l’a dit Jésus, « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12-24).
    Certes, votre Institut est aujourd’hui fragile, faute de renouvellement. Mais ce n’est pas propre à votre communauté : c’est le contexte général de l’Église en France sans ces décennies que nous sommes en train de vivre. Pourtant, la fécondité de votre Institut est bien là, et nous ne doutons pas qu’avec la grâce de Dieu, il continue de porter du fruit dans la mission de l’Église, aujourd’hui et demain comme cette graine que vous avez pu planter dans notre existence.

    En célébrant la Nativité de la Vierge Marie, nous reconnaissons que Dieu a préparé Marie dès sa naissance à être celle qui mettrait au monde le Sauveur, pour le Salut de l’humanité. Cela fait partie du mystère de l’Incarnation qui nous le savons aboutira à la Croix, où Marie se tient, au pied de son Fils, l’Agneau de Dieu immolé.
    Votre Institut, dès sa naissance après la guerre, s’est inscrit pleinement dans ce Mystère du Salut et pour le servir depuis 80 ans, vous êtes avec Marie au pied de la Croix. Elle est bien là aussi pour vous accompagner dans l’étape actuelle que vous traversez ; Marie qui est aussi appelée, je le rappelle, « Mère de l’Espérance ». En cette année jubilaire, ce nom prend tout son sens. Demandons-lui de soutenir chacune de vos sœurs, ainsi que votre Institut dans son ensemble, non seulement dans l’Action de grâce pour tout ce que le Seigneur a réalisé en vous et par vous, mais aussi dans les démarches et les défis que vous avez à affronter aujourd’hui. Amen.

    † Laurent DOGNIN 
    Évêque de Quimper et Léon