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FÊTE DE TOUS LES SAINTS – 1er novembre 2025

La fête de tous les saints, une grande fête pour les chrétiens.
Mais que signifie-t-elle pour nous ? Quel sens donnons-nous au culte des saints ?
On peut comprendre la sainteté de quatre manières.

La sainteté de Dieu d’abord. Dans la Bible, on présente Dieu comme le seul Saint. Ce qui veut dire qu’il n’y a en lui que la volonté et la capacité d’agir pour le bien, d’agir par amour et bonté. Alors qu’en les êtres humains réside un désir de bien agir mais aussi une tentation de faire le mal. Etres de mélange, ils sont capables de bienfaisance et de malfaisance, de bénédiction et de malédiction. « Le bien que je veux je ne le fais pas, le mal que je ne veux pas je le fais », écrivait st Paul, parlant de lui-même.

La sainteté de Jésus ensuite. Les chrétiens diront de lui qu’il est « le seul saint » le seul homme qui ait été la parfaite image du Dieu saint. Ils ont reconnu en l’homme qu’il était le saint de Dieu. Un homme qui n’avait en lui que la volonté et la capacité d’agir pour le bien, d’agir par amour, qui a toujours résisté au mal sous toutes ses formes.

La sainteté de tous les baptisés. Notre sainteté à tous. On pourrait écrire le mot Toussaint avec un “s”. Nous sommes tous saints. C’est ce que dit St Jean dans la lecture d’aujourd’hui.

Voyez quel grand amour nous a donné le Père
pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes.
Voici pourquoi le monde ne nous connaît pas :
c’est qu’il n’a pas connu Dieu.
Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu,
mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté.
Nous le savons : quand cela sera manifesté,
nous lui serons semblables car nous le verrons tel qu’il est.
Et quiconque met en lui une telle espérance se rend pur
comme lui-même est pur.
1 Jn 3, 1-3

Notre sainteté n’est pas d’abord la perfection morale, l’absence d’erreurs et de défauts. Elle résulte du regard d’amour de Dieu sur nous. Depuis qu’il s’est approché de nous et nous a montré son amour, depuis qu’il nous a sauvés et communiqué sa vie par le baptême en son Fils, il nous a communiqué sa sainteté. A ses yeux, nous sommes saints puisqu’il nous aime tels que nous sommes. Il nous regarde comme nous regardons nos enfants : quels que soient leurs défauts, ils sont en quelque sorte saints, puisque nous les aimons et ne supportons pas qu’ils soient méprisés. Ainsi, nous sommes saints parce qu’aimés, regardés avec amour et bienveillance. La sainteté se trouve donc au commencement, dans l’amour du cœur de Dieu qui nous tient dans l’existence, et qui veut notre bonheur, dans notre foi et notre confiance en lui. Dans la première tradition de l’Eglise, les croyants étaient couramment appelés « les sanctifiés ».

Encore une autre sainteté, celle qui concerne les quelques personnes que l’Eglise a déclaré « saints ». Des hommes et des femmes qui au long de leur vie ont fait preuve d’un grand dévouement, d’un grand courage pour servir le Christ et l’Evangile, pour vivre les béatitudes, la pauvreté, la douceur, la droiture, le pardon, le combat pour la justice parfois même jusqu’à donner leur vie. Nous pouvons considérer qu’il n’y pas que des chrétiens à être des saints. Il y a tous ceux que Jésus « béatifie », déclare bienheureux dans sa proclamation des béatitudes : dans toutes les religions, et aussi chez des non-croyants. C’est leur fête aussi aujourd’hui. On a raison de traduire en justice les tyrans, les criminels qui déshonorent l’humanité. On pense moins à exalter des justes qui honorent l’humanité, qui nous rendent fiers d’être des humains. A « la foule immense, que nul ne peut dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues », comme dit saint Jean.

Moi, Jean, j’ai vu un autre ange qui montait du côté où le soleil se lève,
avec le sceau qui imprime la marque du Dieu vivant ;
d’une voix forte, il cria aux quatre anges
qui avaient reçu le pouvoir de faire du mal à la terre et à la mer :
« Ne faites pas de mal à la terre, ni à la mer, ni aux arbres,
avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu. »
Et j’entendis le nombre de ceux qui étaient marqués du sceau :
ils étaient cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël.
Après cela, j’ai vu : et voici une foule immense,
que nul ne pouvait dénombrer,
une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues.
Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau,
vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main.
Et ils s’écriaient d’une voix forte :
« Le salut appartient à notre Dieu qui siège sur le Trône et à l’Agneau ! »
Tous les anges se tenaient debout autour du Trône,
autour des Anciens et des quatre Vivants ;
se jetant devant le Trône, face contre terre, ils se prosternèrent devant Dieu.
Et ils disaient : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! »
L’un des Anciens prit alors la parole et me dit :
« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »
Je lui répondis : « Mon seigneur, toi, tu le sais. »
Il me dit : « Ceux-là viennent de la grande épreuve ;
ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau.
Ap 7, 2-4.9-14

Le texte des béatitudes évoque de manière concrète ce qu’est la sainteté vécue au jour le jour. Nous pouvons le méditer à partir d’une traduction nouvelle de la Bible qui a été publiée il y a 10 ans.

Joie des pauvres et de ceux qui sont à bout de souffle.
Le Règne des cieux est à eux.

Ceux qui sont marqués dans leur chair par la perte des leurs,
leur façon de vivre et leur rejet par leur entourage.
Les essoufflés de la vie.
Ils sont nombreux tous les pauvres à qui nous pouvons penser aujourd’hui.
Tous ceux dont la vie n’est que blessure et misère de par le monde,
victimes des guerres, des injustices, des famines, des maladies.
Loin de nous, mais aussi cachés dans nos villes, nos quartiers, nos villages,
inquiets pour leur avenir.

Joie des tolérants, ils auront la terre en héritage

Heureux les doux. Qui ont un accueil souriant des autres.
La tolérance est une douceur,
une sérénité et non une violence face à ceux qui sont différents,
qui ne pensent pas, ne croient pas comme nous.

Joie des éplorés, leur deuil sera plus léger

En cette fête de la Toussaint nous faisons mémoire de nos proches,
de tous nos amis en allés.
Pensons à notre devoir de proximité, de consolation pour ceux qui pleurent,
ceux dont le deuil est une épreuve lourde à traverser.

Joie de ceux qui ont faim et soif de justice, ils seront comblés

La justice dont parlent les Béatitudes n’est pas forcément une affaire de tribunaux.
Elle est une affaire de cœur, de faim et de soif.
Qui peut dire qu’il est juste ?
Peut-être celui qui aspire à l’être,
qui aime le partage et l’équité,
qui ne laisse pas étouffer dans la recherche toujours prioritaire de ses intérêts,
mais se préoccupe d’abord de ceux des autres.

Joie des êtres compatissants, ils éveilleront la compassion.

Joie des miséricordieux, ceux qui pleurent avec ceux qui pleurent,
et se réjouissent avec ceux qui sont dans la joie.
Entendre la détresse des autres, donner de son temps pour les écouter.
Notre compassion pour eux peut éveiller en eux aussi leur compassion,
et le monde pourrait ainsi se réchauffer un peu.

Joie des cœurs limpides, ils verront Dieu

Les cœurs purs, ceux dont le regard n’est pas tordu mais droit,
qui résistent aux tentations du mensonge et de la malveillance,
qui ne cherchent pas d’abord les défauts des autres,
mais s’émerveillent de ce qu’ils ont en eux de meilleur,
qui préfèrent encourager que juger et condamner.

Joie des conciliateurs, ils seront appelés enfants de Dieu

Les artisans de paix, qui préfèrent chercher la réconciliation
entre les personnes qui se déchirent et se font la guerre
plutôt que semer la zizanie et jeter de l’huile sur le feu des discordes.

Joie des justes que l’on inquiète, le règne des cieux leur appartient. Joie, oui, joie dans le mépris, la persécution, le fiel, joie et joie encore pour vous, un salaire élevé vous attend dans les cieux. Car avant vous c’est ainsi qu’on a harcelé les prophètes. le règne des cieux leur appartient.

Les justes, les saints sont des gens qu’on dérange,
qui se laissent déranger pour servir les autres,
quitte à perdre leur tranquillité, leur sécurité.
Ce sont aussi des personnes qui dérangent
parce qu’ils veulent servir avant tout la vérité, la liberté,
parce qu’ils dénoncent le mal, les injustices.
Voilà pourquoi on les inquiète.
C’est ainsi que Jésus, le saint et juste par excellence a été inquiété et crucifié.
Harcelé par ses adversaires, persécuté et méprisé,
il mettait en Dieu sa confiance et sa paix.

Evangile selon saint Matthieu – Mt 5, 1-12a