Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  14 septembre 2025 — Fête de la Croix glorieuse – Pardon de Bodonou et installation du Père Éric HUON de KERMADEC comme curé de la paroisse Brest – Sainte-Trinité – Église Saint-Sanè (Plouzané) (29)

14 septembre 2025 — Fête de la Croix glorieuse – Pardon de Bodonou et installation du Père Éric HUON de KERMADEC comme curé de la paroisse Brest – Sainte-Trinité – Église Saint-Sanè (Plouzané) (29)

Nb 21, 4b-9 ; Ps 77 ; Ph 2, 6-11 ; Jn 3, 13-17

Homélie retranscrite à partir d’un enregistrement

Chers amis,

Je faisais remarquer au début de la messe que cette installation de votre curé a lieu le jour de la fête de la Croix glorieuse, et cela donne à cette installation une certaine coloration. En particulier, cela met l’accent sur un aspect très important de son ministère de curé : cura animarum, le soin des âmes. C’est de là que vient le mot curé. Le curé, c’est celui qui soigne. Ce ministère prend sa source dans la Croix du Christ, il est donc entièrement tourné vers le Christ. Comme le dit saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20). C’est véritablement un ministère de Salut et de guérison, comme je le développerai dans quelques instants.

Il faut reconnaître que la Croix est un signe très choquant. Il a fallu attendre le début du IVᵉ siècle pour que les chrétiens se reconnaissent dans ce signe, car c’était un signe épouvantable : celui du supplice romain. Ce n’est pas par ce signe que les premiers chrétiens se reconnaissaient. C’est venu par la suite. Le fait que le Messie soit cloué en Croix était un scandale encore plus fort : « Scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes » (1 Co 1,23), comme dit saint Paul.

Mais ce signe de la Croix s’est imposé d’une façon très forte pour les croyants au cours de l’histoire, et il reste aujourd’hui le signe par excellence qui unit tous les chrétiens de la terre, quelle que soit leur confession. C’est une Croix glorieuse, comme nous le fêtons aujourd’hui, puisque Jésus a en quelque sorte « tué la mort » par sa résurrection, selon l’expression des Pères de l’Église.

C’est d’ailleurs ce signe que nous faisons au moment de la Semaine sainte, lorsque nous plaçons un rameau sur la Croix pour manifester que ce n’est pas un signe de mort, mais de vie. C’est un symbole très fort. Le montant vertical de la Croix symbolise le lien que Jésus a établi entre Dieu et les hommes, un lien inaltérable : « Celui qui m’a vu a vu le Père », dit Jésus. Et saint Paul exprime magnifiquement ce mystère dans la lettre aux Philippiens que nous avons entendue en deuxième lecture : « Il s’est abaissé jusqu’à la mort, c’est pourquoi Dieu l’a exalté ».

Nous voyons aussi dans cette dimension verticale le fait que, par Jésus, montent nos prières et nos cris de souffrance. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27,46), dit Jésus sur la Croix. Et dans cette prière, le Christ porte toute la souffrance des hommes. Il faut reconnaître que lorsque nous sommes dans l’épreuve, lorsque nous souffrons, en nous tournant vers la croix, nous recevons une paix extraordinaire.

J’ai rencontré un jour une personne qui ne connaissait pas Jésus. En regardant la Croix, elle a dit : « C’est moi qui suis sur la croix. » Elle se reconnaissait dans sa souffrance et, dès lors, elle a voulu savoir qui était celui qui se trouvait sur la Croix. C’est ainsi qu’elle a commencé à découvrir la foi chrétienne et qu’elle a demandé le baptême. La Croix peut être une source de Salut pour des personnes qui sont très éloignées de la foi.

Il y a aussi le montant horizontal de la Croix, avec les bras étendus du Christ, qui manifeste cet amour universel que Jésus étend à toute l’humanité, afin que « quiconque croit ait, par Lui, la vie éternelle », et que « par Lui le monde soit sauvé », comme nous l’avons entendu dans l’Évangile.

Quand nous voyons l’état du monde actuel, cela a du sens de nous tourner vers la Croix du Christ, car elle est vraiment un signe d’espérance au milieu de nos épreuves. Comme le dit le pape François dans la bulle d’indiction de l’Année sainte que nous vivons : « L’espérance naît de l’amour et se fonde sur l’amour qui jaillit du cœur de Jésus transpercé sur la croix. »

Cette espérance était déjà donnée aux Hébreux en détresse dans le désert, en première lecture. En effet, le serpent de bronze était un signe d’espérance et une source de salut, de guérison, car celui qui, mordu par un serpent, devait mourir, en regardant le serpent de bronze, était sauvé. C’est beau que Jésus ait repris cette image pour manifester le Salut qu’il apporte à l’humanité lorsque les gens se tournent vers Lui.

Puisque nous sommes dans une célébration d’installation, rappelons que le prêtre est là pour manifester à tous le Salut qui nous vient de la Croix glorieuse du Christ. Le prêtre nous aide à nous tourner vers le Christ et à mettre en lui notre foi. Il le fait par la prédication, par la catéchèse, par ses enseignements et par son apostolat dans toutes ses dimensions. Il nous encourage en particulier à nous former, pour mieux comprendre qui est le Christ et pourquoi nous devons nous tourner vers Lui.

Il l’a manifesté aussi par la proclamation de l’Évangile, ce qu’il a fait aujourd’hui lui-même. Il le manifestera encore en proclamant le Credo, d’abord seul, puis en vous invitant vous aussi à proclamer votre foi.

Le prêtre est également celui qui nous permet d’être guéris et sauvés de la mort par le Christ à travers les sacrements : baptême, confirmation donnée avec l’évêque, Eucharistie, sacrement de pénitence et de réconciliation — véritable sacrement de Salut —, ainsi que le sacrement des malades, qui est un grand soutien pour ceux qui souffrent justement.

Tout cela concerne la liturgie, qui fait partie d’une des sept orientations que j’ai promulguées, afin que nous puissions progresser dans la beauté de nos liturgies pour qu’elles soient belles et deviennent de véritables lieux de Salut et de guérison pour tous.

Enfin, le prêtre est là pour manifester l’amour de Jésus à chacun. Comme le Christ, il étend ses bras pour accueillir tous ceux qui se présentent, quels qu’ils soient. Cela rejoint la première orientation que j’ai promulguée à la Pentecôte : accueillir toutes les situations de vie. Le prêtre permet aussi aux personnes en précarité de trouver leur place dans l’Église. Il appelle également chacun à servir.

Il est donc là, au nom du Christ, pour manifester concrètement tout cela. Nous l’évoquerons de manière liturgique dans la prière universelle puisque je me déplacerai avec votre nouveau curé dans les différents lieux de l’église liés à son ministère de guérison, et à chaque étape nous adresserons une prière adaptée.

Nous allons prier pour lui, pour les prêtres et les diacres qui collaborent avec lui, et aussi pour les laïcs engagés dans la paroisse, afin que votre curé puisse accomplir pleinement la mission que je lui ai confiée au nom du Seigneur. Évidemment, il ne peut pas le faire seul. C’est toute l’Église qui est missionnaire !

Cela correspond au deuxième chantier que nous avons promulgué : une coresponsabilité plus ajustée entre prêtres, laïcs et diacres, pour éviter que le curé soit accaparé par l’administration de la paroisse et délaisse le cœur de son ministère, qui est un ministère de guérison et de Salut pour tous.

En ce jour, nous voulons aussi honorer la Vierge Marie, Notre-Dame de Bodonou. La tradition rapporte qu’elle a protégé Plouzané de la peste. Nous pouvons aujourd’hui l’invoquer afin qu’elle nous protège de toutes les formes du mal et qu’elle nous aide à tourner notre regard vers la Croix de Jésus, source de toute guérison, source de pardon et de vie. Amen.

† Laurent DOGNIN 
Évêque de Quimper et Léon