Am 8, 4-7 ; Ps 112 (113) ; Tm 2, 1-8 ; Lc 16, 1-13
Frères et sœurs,
Les lectures de ce 25e dimanche du Temps Ordinaire ne sont pas forcément très adaptées pour l’installation d’un curé, mais finalement la Parole de Dieu, quelle qu’elle soit, nous aide toujours à aborder un aspect de son ministère ! La parabole du gérant malhonnête n’échappe pas à cette règle, car elle aborde la question de notre rapport à l’argent et de la place qu’il tient dans notre vie. Cela touche donc à la gestion financière de la paroisse. Mais aucun rapport évidemment entre ce gérant malhonnête et votre nouveau curé !
Jésus nous met en garde : « Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent », donc avec le risque de le rendre idolâtrique ! Mais l’argent est tout de même bien nécessaire pour vivre, nous en faisons l’expérience douloureuse lorsque nous en manquons ! En nous demandant de nous « faire des amis avec l’argent malhonnête », Jésus nous invite à utiliser l’argent pour faire grandir le Royaume de Dieu, c’est-à-dire l’amour de Dieu et du prochain. C’est bien Dieu qu’il faut servir ! En traitant l’argent de « malhonnête », il nous montre qu’il faut être vigilants avec les questions d’argent qui peuvent même diviser les familles. Comme le dit le psalmiste : « Si vous amassez des richesses, n’y mettez pas votre cœur. » (Ps 61, 11)
De même, le curé a donc, entre autres, la charge de la gestion de la paroisse. Il doit le faire en « bon père de famille » comme on dit, pour assurer la vie de la communauté qui lui est confiée et permettre qu’elle puisse accomplir pleinement sa mission. D’où l’importance de la quête, des casuels, et surtout du Denier de l’Église auquel chaque foyer chrétien est tenu de participer selon ses moyens, ce qui malheureusement est loin d’être le cas !
Cette responsabilité, il la porte avec une équipe compétente de bénévoles pour assurer le quotidien de la comptabilité et d’un conseil économique pour le guider dans les choix budgétaires. Son délégué aux affaires temporelles supervise tout cela afin de permettre au curé de donner le meilleur de son temps pour le soin des âmes, cura animarum, comme son titre de curé l’indique. C’est cet aspect essentiel de sa mission que je veux développer maintenant.
Dans le 2e chantier que j’ai promulgué avec les orientations lors de la fête diocésaine de la Pentecôte, j’ai demandé que l’on travaille pour une meilleure répartition des tâches entre prêtres, diacres et laïcs afin que chacun ait vraiment sa place en fonction de ses charismes et compétences. Et cela pour que les prêtres puissent se consacrer au mieux dans le ministère que personne ne peut faire à leur place !
Ce soin des âmes, ils l’accomplissent dans les tria munera, les trois tâches de la mission qu’ils partagent avec moi : annoncer l’Évangile, sanctifier le peuple chrétien et gouverner l’Église de Dieu. Dans ces trois tâches, on retrouve les orientations que j’ai promulguées à la Pentecôte et qui avaient été discernées comme des priorités pour la conversion missionnaire de notre diocèse.
La première tâche est donc d’annoncer l’Évangile. Il l’accomplit par la prédication, les enseignements, la catéchèse des jeunes et des adultes qui sont de plus en plus nombreux à demander le baptême et aussi la confirmation pour ceux qui ne l’ont pas reçue quand ils étaient jeunes. C’est central dans son ministère.
Dans les orientations, nous avons insisté sur l’importance de la formation. Cette formation est d’autant plus nécessaire aujourd’hui dans une société sécularisée où beaucoup de gens, y compris au sein de nos familles, interrogent notre foi. La formation enracine notre vie de croyant dans la Parole de Dieu et nous rend capables de leur répondre. Le curé avec ses confrères a donc cette responsabilité de promouvoir la formation.
La deuxième tâche est la sanctification du peuple chrétien. Le curé, avec les autres prêtres et les diacres, célèbre les sacrements par lesquels le Seigneur répand ses grâces en nous délivrant du mal et du péché et en nous faisant participer à sa vie divine. Le curé a aussi cette responsabilité de permettre à chacun de se préparer et de recevoir ces dons de Dieu.
Dans les orientations, nous avons demandé un effort de tous. Pas seulement les prêtres et les diacres, mais aussi ceux qui préparent et animent les liturgies pour qu’elles soient belles et nous fassent vraiment entrer dans le mystère de « Dieu (qui) s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu » comme le dit si bien saint Irénée. De plus, une belle liturgie permet d’unir dans une même communion toutes les sensibilités du peuple chrétien.
Dans ces deux premières tâches, il y a aussi l’orientation sur l’importance de la culture et de la langue bretonne, dont les cantiques et les pardons sont des lieux d’évangélisation. À Brest – Sainte-Trinité s’était sans doute moins sensible, mais ici ça l’est beaucoup plus, notamment avec le grand pardon de Sainte Anne-la-Palud, et aussi les autres pardons, nombreux, de cette paroisse.
Enfin la troisième tâche, c’est de gouverner le peuple de Dieu. Le curé s’efforce de la mettre en œuvre à la manière de Jésus, le Bon Pasteur. « Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent… et je donne ma vie pour mes brebis », dit Jésus (Jn 10, 14-15). Le curé, avec ses coopérateurs et son équipe pastorale, est là pour nous faire marcher ensemble et nous montrer le chemin que Jésus nous invite à suivre pour entrer dans la vie.
Dans les orientations diocésaines, nous avons souligné l’importance d’accueillir et d’accompagner toutes les situations de vie ; de vivre un compagnonnage avec les plus pauvres ; de créer des Petites Fraternités Chrétiennes Locales. Ces orientations étant si importantes notamment en cette paroisse rurale pour rendre présente l’Église en proximité dans chaque bourg et permettre à tous de grandir dans sa foi.
Dans cette tâche de gouvernement, il y a aussi la nécessité de faire la communion pour que le témoignage de notre foi soit crédible aux yeux du monde. Comme le disait le curé d’une autre paroisse qui avait pas mal d’humour : « Dans ma paroisse il y a plusieurs coiffes différentes, comment voulez-vous que je fasse l’unité ? » Je ne suis pas un grand connaisseur des coiffes bretonnes de ces territoires, mais il est vrai que la communion n’est pas facile avec des mentalités qui ne s’accordent pas toujours !
Votre curé a cette responsabilité de la communion, mais chacun doit y mettre du sien, comme saint Paul nous le demande dans la deuxième lecture en insistant pour : « qu’en tout lieu les hommes prient en élevant les mains, saintement, sans colère ni dispute ».
Enfin, lors de la fête de la Pentecôte, j’ai annoncé que j’allais consacrer notre diocèse au Sacré-Cœur de Jésus le 14 décembre. J’en donnerai le sens et les raisons dans une lettre pastorale qui sortira le 1er octobre, mais je souhaite par cet acte fort que nos orientations ne se limitent pas à des efforts pastoraux, si légitimes soient-ils, mais que l’amour de Jésus y soit pleinement accueilli et vénéré pour leur faire porter du fruit en abondance. C’est ce que nous pouvons souhaiter aussi pour cette belle paroisse Sainte-Anne – Châteaulin et pour ses nouveaux pasteurs. Amen.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon