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24 juillet 2022 -17ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C – Consécration de l’autel de l’église St Égat de Plouégat-Guérand

Gn 18, 20-32 ; Ps 137 ; Col 2, 12-14 ; Lc 11, 1-13

Frères et Sœurs,

Au moment où nous allons consacrer ce nouvel autel, c’est l’enseignement de Jésus sur la prière qui nous est donné dans l’Évangile. Jésus nous invite à prier le Notre Père qui résume toutes les prières, mais surtout qui montre ce qu’est une véritable prière chrétienne car Jésus nous demande de prier en tant que fils et filles bien-aimés du Père et non pas comme des créatures qui s’adresseraient à un Dieu lointain.

Or dans la prière du Notre Père, il y a une phrase qui nous concerne particulièrement en ce jour où nous allons consacrer cet autel : « Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour. » Nous pouvons interpréter cette demande au premier degré, c’est-à-dire demander à Dieu la grâce de pouvoir nourrir notre corps. Nous savons que beaucoup de gens dans le monde peuvent prier en ce sens car ils manquent de tout.

Mais nous pouvons aussi y voir, comme l’ont fait les Pères de l’Église, une demande à recevoir le « pain des anges », c’est-à-dire la communion eucharistique qui est la vraie nourriture : « Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. » dit Jésus. (Jn 6, 33)

Jésus a pleinement incarné cette prière du Notre Père qu’il nous a donnée. En fait, c’est sa prière dans laquelle il nous demande d’entrer ! Il intercède pour les justes comme pour les pécheurs, et il a donné sa vie sur la croix pour nous sauver. Cette prière du Notre Père, il l’a vécue dans sa chair.

C’est ce sacrifice de Jésus, ce don de sa vie, que nous continuons à célébrer sur l’autel à chaque fois que nous célébrons la messe. Comme le dit St Paul : « Ainsi donc, chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. » (1 Co 11, 26).

Dans sa lettre du 29 juin dernier, Desiderio Desideravi, le pape François nous dit : « Nous ne devrions pas nous permettre ne serait-ce qu’un seul instant de repos, sachant que tous n’ont pas encore reçu l’invitation à ce repas, ou que d’autres l’ont oubliée ou se sont perdus en chemin dans les méandres de la vie humaine. (…) afin que tous puissent s’asseoir au repas du sacrifice de l’Agneau et vivre de Lui. » (Desiderio Desideravi n°5)

C’est dire à quel point l’autel est un lieu particulièrement sacré dans l’église !
Dans la prière de consécration que je vais chanter, il y a plusieurs attributs qui nous font bien comprendre ce que représente l’autel placé dans le chœur de l’église : Le symbole du Christ, la table de fête et la source d’unité de son peuple. Je voudrais reprendre ces trois aspects :

  1. « Que cet autel soit pour nous le symbole du Christ… » :
    L’autel, placé dans ce sanctuaire, rappelle l’autel des sacrifices qui se trouvait dans le temple de Jérusalem, où les gens venaient apporter des offrandes ; ces offrandes pouvaient être des prémices de leurs troupeaux, des prémices de leurs récoltes. Ainsi, ils remerciaient Dieu de les combler de tous les bienfaits que pouvait produire la terre.
    Il y avait aussi des sacrifices pour demander pardon. Au fond tout ce qui était offert sur cet autel avait pour but de mettre les croyants en communion avec Dieu. L’autel avait donc évidemment énormément d’importance.

Avec le sacrifice de Jésus, la signification de l’autel a évolué, mais il y a un lien très profond avec ce qui se célébrait déjà dans l’Ancienne Alliance. Pour nous, ce ne sont plus des animaux bien sûr que nous sacrifions sur l’autel en signe de communion, c’est le Christ qui a versé son sang une fois pour toute sur l’autel de la croix et ce sang, signe de vie, nous délivre de nos péchés et nous fait entrer en communion parfaite avec Dieu.

C’est pourquoi cet autel recevra l’onction de Saint-Chrême, l’huile sainte… comme nous l’avons reçue nous-même à notre baptême et à notre confirmation. Cette huile sainte qui marque aussi pour toujours les évêques et les prêtres lors de leur ordination.

Lorsqu’au début de la messe, le prêtre s’incline devant l’autel, le vénère en l’embrassant et qu’il l’encense, c’est bien le Christ qu’il vénère ainsi. Ce n’est pas un meuble ordinaire !

  1. « Que cet autel soit la table de fête où les convives du Christ afflueront dans la joie… »
    Lorsque nous mettons une nappe sur l’autel, avec les vases sacrés qui contiennent le pain et le vin, qui deviendront Corps et Sang du Christ, cela nous fait penser à la nappe que nous mettons sur nos tables familiales lors des fêtes qui nous rassemblent dans la joie.

Mais là, c’est la table du repas dans lequel Jésus se donne en nourriture. Une nourriture qui nous fait entrer dans sa vie pour toujours. Comme l’exprime si bien la prière de consécration : « Que cet autel soit un lieu de paix et de profonde communion avec toi… pour que tes enfants, nourris du corps et du sang de ton Fils, et abreuvés de son Esprit, grandissent dans ton amour. »

  1. « Qu’il soit source d’unité pour l’Église et source d’union entre les frères »
    Ce n’est pas pour rien que tous les sièges de l’église sont orientés vers l’autel. Cela symbolise le peuple chrétien qui se rassemble autour de son Seigneur et qui, par là même, est appelé à faire grandir la fraternité en étant toujours davantage attentifs à ceux qui ont plus de difficultés, manquent du nécessaire ou qui se sentent marginalisés.

Le fait de nous tourner ensemble vers l’autel qui représente le Christ pour écouter sa parole, le louer, lui rendre grâce et nous nourrir de son Corps est un véritable engagement pour nous.
On ne vient pas à la messe de façon individuelle, pour notre propre besoin personnel, même si cela nous aide aussi à grandir dans la foi. On vient à la messe pour que le Christ fasse de nous tous son Corps. Notre simple présence nous ouvre à cela, mais aussi notre prière, notre foi, notre engagement à suivre Jésus en nous mettant au service des autres.

En cette période où les catholiques se divisent sur les questions liturgiques en raison de leurs diverses sensibilités, accueillons ces paroles du pape François, toujours dans sa lettre du 29 juin :

« Abandonnons nos polémiques pour écouter ensemble ce que l’Esprit dit à l’Église. Sauvegardons notre communion. Continuons à nous émerveiller de la beauté de la liturgie. La Pâque nous a été donnée. Laissons-nous toucher par le désir que le Seigneur continue d’avoir de manger sa Pâque avec nous. Sous le regard de Marie, Mère de l’Église. » (Desiderio-Desideravi n°65)
AMEN

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon