Accueil  -  Les homélies de Mgr Laurent Dognin  -  26 février 2020 —Mercredi des Cendres — Cathédrale Saint-Corentin – Quimper (29) Jl 2, 12-18 ; Ps 50 ; 2Co 5, 20-60,2 ; Mt 6, 1-6.16-18

26 février 2020 —Mercredi des Cendres — Cathédrale Saint-Corentin – Quimper (29) Jl 2, 12-18 ; Ps 50 ; 2Co 5, 20-60,2 ; Mt 6, 1-6.16-18

Frères et Sœurs,

Lorsque nous entrons chaque année en Carême, nous pensons souvent aux efforts que nous devrons faire comme nous le propose l’Église. Je pense par exemple au jeûne du vendredi, au fait qu’on ne chante pas l’Alléluia dans la liturgie… et d’autres efforts que nous nous donnons. Mais il ne faut pas perdre de vue pour autant l’objectif du Carême qui est de raviver notre amitié avec le Christ, notre fidélité à l’Évangile et donc aussi la qualité de nos relations avec les autres.
On ne peut pas se limiter à ce qu’on doit faire ou pas faire. Avec souvent à la fin, le constat qu’on n’aura pas fait un bon Carême puisqu’on n’aura pas été très fidèle dans les efforts pour lesquels nous nous étions engagés ! C’est prendre le Carême par le petit bout de la lorgnette comme on dit ! Bien sûr, les moyens que nous pouvons prendre sont importants, je vais en parler, mais ce qui compte vraiment, c’est la conversion comme nous le dirons tout à l’heure en nous imposant mutuellement les cendres : « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. »

Les textes de la Liturgie de ce jour sont bien clairs : « Revenez à moi de tout votre cœur » dit le prophète Joël, « Laissez-vous réconcilier avec Dieu » dit Saint-Paul. Et dans l’Évangile, Jésus montre clairement que l’aumône, la prière et le jeûne sont importants et Il nous invite à les vivre sans ostentation, mais ce ne sont que des moyens pour raviver notre relation de fils et filles bien-aimés du Père : « Ton Père qui est présent dans le secret te le rendra. » dit Jésus. C’est cela qui compte vraiment.
Le Carême nous prépare donc vers son terme, à savoir la Vigile Pascale, durant laquelle nous serons invités à renouveler solennellement nos promesses de baptême. Et nous savons très bien pourquoi nous devons les renouveler, car justement la vie nous en écarte bien des fois et nous avons besoin que le Seigneur nous tende la main pour nous rendre notre dignité de disciple. Nous avons besoin chaque année de vivre ensemble ce temps de purification, de renouvellement de notre amitié avec le Christ et de notre fidélité à ses commandements.
Ce temps de Carême, nous le vivons avec les catéchumènes qui cheminent avec nous. Ils sont 50 adultes cette année dans le diocèse. Dimanche prochain, je les appellerai officiellement ici même à entrer dans cette ultime préparation et ce temps de conversion qui les conduira à recevoir les sacrements de l’initiation chrétienne lors de la Vigile Pascale.

S’il faut d’abord avoir en tête l’objectif du Carême, il faut évidemment en prendre les moyens. Ces moyens doivent nous aider à entrer dans le combat spirituel, comme celui qu’a mené Jésus contre toutes les tentations du diable qui a cherché à le faire dévier de sa route. C’est en ce sens que le Carême est un temps d’épreuve, mais au sens positif du terme. Comme nous utilisons ce terme pour les épreuves sportives ou les examens. Autrement dit pour en sortir grandi, plus fort, plus fidèle, profondément renouvelé.
Les trois moyens cités par Jésus, l’aumône, la prière et le jeûne, sont des moyens traditionnels pour entrer dans ce combat spirituel et en sortir victorieux, mais il faut les adapter à notre situation, à notre âge et à notre santé et surtout envisager notre chemin de Carême de façon plus globale. Qu’est-ce que je dois changer dans ma vie aujourd’hui pour être davantage fidèle au Seigneur ?
Faire abstinence pendant le Carême, c’est peu de chose, mais cela nous aide à prendre conscience que nous avons un corps, que ce corps est vulnérable, mortel, comme nous le rappelle la deuxième formule de l’imposition des cendres : « Souviens-toi que tu es poussière, et que tu retourneras en poussière. » Prendre conscience de sa fragilité, c’est adopter une attitude d’humilité. Celui qui se croit invulnérable n’a pas besoin de Dieu, mais il se perd sans s’en rendre compte, car seul le Christ nous permet de devenir « juste de la justice même de Dieu », comme le dit Saint-Paul.
Je disais que les moyens sont importants pour atteindre ce but. Cela a du sens par exemple de remplacer un repas par un temps de prière alors justement que nous vivons dans une société d’abondance et de surconsommation et que, par ailleurs, nous sommes aussi souvent en manque de silence et de prière. Bien sûr, il est plus difficile de demander cela aux plus jeunes, mais ils peuvent jeûner d’autre chose, par exemple de temps passé sur les écrans : télévision, mais surtout réseaux sociaux, jeux vidéo, musique… en prenant plus de temps pour le silence, la prière, la lecture, et pour parler avec ceux qui nous entourent en chair et en os ! Le Carême, c’est aussi s’intéresser aux autres.

L’aumône, c’est bien sûr de partager avec ceux qui sont dans le besoin, mais aussi de prendre du temps pour visiter des personnes isolées ou malades… Jésus en parle dans la parabole du jugement dernier : « J’avais faim, dit Jésus, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi ! » Mt 25, 35-36.
Voilà donc d’autres formes d’aumône dont certaines sont accessibles par tout le monde, selon notre situation évidemment et les opportunités qui se présentent à nous, mais que nous pouvons aussi susciter !
Nous vivons ce Carême ensemble, et cela est important, car nous prions les uns pour les autres, nous nous entrainons mutuellement dans ce combat spirituel, mais le Seigneur est là aussi et il nous soutient par les sacrements. Nous pouvons faire un effort pour être plus fidèles à la messe, et même en semaine si nous le pouvons.

Et enfin il y a le sacrement de pénitence et de réconciliation par lequel le Seigneur nous pardonne nos péchés et nous libère du poids de nos fautes. N’ayons pas peur de faire cette démarche, même si cela fait très longtemps que nous ne nous sommes pas confessés. Le Seigneur nous aime et nous attend pour nous combler de sa miséricorde.

Comme dit Saint-Paul : « Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut. » AMEN

† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon